Paul Hayotte
(Psy.D./Ph.D. psychologie, 2023)
Titre de sa thèse: «La place des nouvelles technologies durant les cinq premières années de la relation grand-parentale»
Direction de recherche: Liesette Brunson, professeure au Département de psychologie
Lorsque Paul Hayotte a commencé son projet de thèse sur le rôle des nouvelles technologies dans la relation grand-parentale, en 2018, il était loin de se douter qu’une pandémie mondiale viendrait accélérer l’utilisation de ce type d’interface à l’échelle planétaire. «À l’époque, on ne connaissait même pas Zoom», se rappelle en riant le jeune chercheur, qui avait présenté l’objet de ses recherches à Actualités UQAM.
Presque cinq ans plus tard, l’utilisation des Skype, FaceTime, Teams et Zoom est désormais monnaie courante. Par chance, Paul Hayotte a eu le temps de boucler sa cueillette de données avant le confinement. «La surutilisation des technologies de visioconférence aurait faussé mes résultats et ne m’aurait pas permis de tester mon hypothèse», souligne celui qui a soutenu sa thèse en décembre dernier et qui, depuis, est installé dans le nord-est de la France, où il travaille pour une Agence régionale de santé.
La prémisse de sa thèse était que la relation grand-parentale peut être consolidée par l’utilisation des nouvelles technologies, plus spécifiquement la visioconférence. «Je souhaitais déconstruire l’idée selon laquelle les nouvelles technologies ne sont utiles que lorsque les grands-parents habitent très loin de leur petit-enfant. Et ma thèse le démontre: peu importe la distance, les grands-parents utilisent les nouvelles technologies pour construire et consolider leur relation avec leur petit-enfant. Cela contribue à la fois à la qualité de leur relation et à leur propre bien-être.»
Une incursion dans la routine familiale
Bien sûr, cette relation à distance ne doit pas se substituer à la relation en personne, précise Paul Hayotte, qui a récolté des données à l’aide d’un questionnaire auprès de 366 grands-parents en relation avec un petit-enfant de 5 ans ou moins, en plus de réaliser quelques entrevues. «L’utilisation des nouvelles technologies est complémentaire des visites en personne et possède même quelques avantages propres, notamment de permettre de courts échanges, dès le plus jeune âge du petit-enfant, et de s’adapter à l’horaire des parents.»
Une visite en personne doit être planifiée, précise le chercheur, tandis qu’un appel vidéo peut se glisser dans un horaire de soirée chargé où il faut préparer le repas, donner le bain, raconter une histoire, etc. «C’est un moment privilégié pour le grand-parent, une incursion au cœur de la routine familiale, qui peut durer quelques secondes ou quelques minutes.»
Pour les grands-parents, il s’agit non seulement de moments privilégiés avec leur petit-enfant, mais également avec leur propre enfant. «Les études antérieures ont démontré que le parent joue un rôle de médiateur dans la relation grands-parents/petits-enfants, précise Paul Hayotte. Bien que je n’aie pas analysé ce rôle en particulier dans ma thèse, j’ai pu observer que la routine familiale influence la fréquence des contacts et que ce sont les grands-parents qui s’adaptent à cette contrainte. Or, la reconnaissance du rôle grand-parental dans la routine familiale passe par une discussion, au préalable, entre le grand-parent et son enfant pour établir des balises.»
La durée n’a pas d’importance
Même les très courts échanges bénéficient à la qualité de la relation, a constaté avec étonnement Paul Hayotte, chaque grand-parent pouvant adapter ses échanges en fonction de l’âge et des intérêts de son petit-fils ou de sa petite-fille. «Plusieurs d’entre eux m’ont raconté avec humour que lorsque leur petit-enfant était très jeune, il courait partout et l’écran virevoltait en tous sens. Ils ne le voyaient pas beaucoup! Mais ces moments privilégiés étaient tout de même importants et contribuaient à la qualité de leur relation.»
Certains grands-parents en profitent pour faire des jeux, pour raconter une histoire ou pour envoyer des images ou des photos de choses que leur petit-enfant apprécie, comme un tracteur, un animal ou une petite voiture.
Un lien malgré l’éloignement
Lorsque les grands-parents habitent loin de leur petit-enfant, les nouvelles technologies aident à forger et à maintenir le lien d’attachement. «Malgré la distance, le fait de se voir par écrans interposés et d’entendre la voix de son grand-parent permet au petit-enfant de nouer une relation, explique Paul Hayotte. Lorsqu’ils se voient enfin en personne, il n’y a pas de gêne du côté du petit-enfant, son grand-parent n’étant pas un inconnu.»
Le chercheur a observé que l’inverse est tout aussi vrai. «Plusieurs grands-parents m’ont révélé qu’en plus des bénéfices de la visioconférence, le fait de pouvoir conserver des photos ou des vidéos leur permet d’entretenir ce sentiment de proximité avec leur petit-enfant. Cet aspect mériterait d’être exploré dans des études ultérieures», conclut-il.