Le pape François sera en visite à Edmonton, à Québec et à Iqaluit, du 24 au 29 juillet prochains. Cette visite pastorale nommée Marcher ensemble le mènera, annonce l’Église catholique, sur «un chemin de guérison et de réconciliation historique» avec ceux et celles qui ont fréquenté les pensionnats autochtones ainsi que leurs descendants. Fréquentés par plus de 150 000 enfants du 17e siècle jusqu’à la fin des années 1990, ces pensionnats ont eu des effets dévastateurs non seulement sur les survivants, mais également sur leurs familles et leurs communautés. Le gouvernement canadien a d’ailleurs admis que ce système imposé aux peuples autochtones visait à détruire leurs cultures, leurs identités et leurs histoires.
Que signifie cette visite du pape, la première au Québec depuis celle de Jean-Paul II en 1984? Trois spécialistes de l’UQAM – la professeure du Département de sciences de religions Catherine Foisy, le chargé de cours du Département de science politique Pierre Trudel et le professeur émérite du Département de sciences des religions Louis Rousseau – s’entendent pour dire que la visite aura un impact positif sur les communautés autochtones. «C’est un symbole important, une étape vers une plus grande reconnaissance des torts subis et vers une réconciliation», souligne Pierre Trudel. «La visite du pape François était fortement souhaitée par les communautés autochtones elles-mêmes, qui ont dans leurs cultures une sensibilité plus forte à ces grands gestes diplomatiques que les non-Autochtones, ajoute Louis Rousseau. Le fait que Rome vienne à la rencontre de nations que le Canada n’a jamais reconnues marque aussi des points.»
La personnalité du pape François, qui démontre plus d’ouverture que ses prédécesseurs sur plusieurs sujets – non seulement sur la reconnaissance des peuples autochtones, mais aussi sur le mariage gai, sur l’homosexualité ou sur les abus sexuels commis par les prêtres catholiques –, ajoute à la sincérité de cette visite. «Le pape François a une lecture sociale progressiste, qui détonne par rapport à la curie romaine et au collège épiscopal qui l’entourent», affirme Catherine Foisy. «Né en Argentine, ce pape connaît par expérience le rôle du catholicisme dans les rapports colonisateurs avec les populations autochtones en Amérique du Sud, renchérit Louis Rousseau. Cette expérience le rend sensible à ce qui a été vécu par les Autochtones au Canada.»
Si la visite du pape François est saluée comme un premier pas important, d’autres actions devront être posées au cours des prochaines années pour que la réconciliation se poursuive. «Toute la hiérarchie de l’Église catholique au Canada devrait se repentir, puis être repensée au complet, affirme Catherine Foisy. Même si je ne doute pas de la bonne volonté de certains évêques, prêtres et missionnaires canadiens, une proportion importante de la hiérarchie épiscopale voit dans cette visite papale une occasion de redorer l’image de l’Église et de gagner du temps.»
«La visite du pape ne compensera pas les torts causés par les crimes commis envers les Autochtones, souligne Pierre Trudel. Les recommandations de la Commission vérité et réconciliation du Canada précisent qu’une compensation financière à la hauteur des préjudices subis, comme le droit le prévoit en général, devra être versée.»
Liste d’experts de l’UQAM
Des spécialistes sont disponibles pour répondre aux questions des médias au sujet de cette visite très attendue, qui coïncide avec la fête de sainte Anne, qui était la grand-mère de Jésus. «L’église Sainte-Anne-de-Beaupré de Québec, que visitera le pape le 28 juillet, a été choisie parce que la figure de la grand-mère occupe une place particulière dans les traditions autochtones», observe Louis Rousseau. On peut consulter la liste d’experts.