La Chaire UNESCO de développement curriculaire a reçu le mandat d’analyser les programmes d’enseignement en langues, mathématiques et sciences offerts au premier cycle du secondaire dans les pays francophones d’Afrique subsaharienne. Ce projet est mené en collaboration avec la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN), dont la mission est d’appuyer les politiques régionales et internationales en matière d’éducation ainsi que les réformes en cours.
«Nous avons obtenu ce mandat à la suite d’un appel d’offres international, ce qui constitue une belle marque de reconnaissance de notre expertise», souligne le professeur du Département de didactique Patrick Charland, cotitulaire de la Chaire avec son collègue Stéphane Cyr, du Département de mathématiques. Créée en 2009 sur recommandation de la Commission canadienne de l’UNESCO, la Chaire étudie les systèmes éducatifs en contexte d’urgence, de reconstruction et de développement, et vise à devenir un pôle de recherche sur ces enjeux dans la Francophonie.
Définir des connaissances et des compétences
La tâche de la Chaire UNESCO de développement curriculaire consistera à définir un noyau commun de connaissances et de compétences à acquérir dans les programmes de français, de mathématiques et de sciences au secondaire, en vue d’élaborer un examen de type PASEC destiné aux pays d’Afrique francophone.
Créé en 1991, le Programme d’analyse des systèmes éducatifs (PASEC) mène, tous les quatre ans, une évaluation internationale des programmes d’enseignement du primaire (2e et 6e années) en lecture et en mathématiques offerts dans les pays membres de la CONFEMEN. «Cette évaluation comporte un examen qui permet de mesurer les compétences dont la maîtrise conditionne les trajectoires scolaires et l’insertion sociale», note Patrick Charland. Le PASEC permet aussi d’apporter les correctifs nécessaires à l’amélioration de la qualité des enseignements et des apprentissages, et de colliger des informations sur les élèves, les classes, les écoles, les communautés locales et les politiques éducatives afin d’analyser les facteurs de réussite scolaire.
On constate que seulement 40 % des pays d’Afrique subsaharienne ont participé à des évaluations internationales des apprentissages et que moins de la moitié d’entre eux ont effectué une évaluation à l’échelle nationale. De plus, ces évaluations délaissent généralement l’enseignement au secondaire, lequel joue pourtant un rôle essentiel dans l’éducation de base.
Pour la CONFEMEN, l’évaluation des apprentissages au secondaire constitue une priorité, souligne Patrick Charland. «L’objectif est de créer un examen PASEC à la fin du parcours éducatif de base, soit à la fin du premier cycle du secondaire, pour cerner les acquis des élèves ayant cheminé jusque-là. Cela permettra d’identifier les pays où les élèves performent bien et ceux où des efforts doivent être déployés pour améliorer les apprentissages. Ces derniers pays pourront alors bénéficier du soutien du Centre KIX Afrique 21.»
Le projet piloté par la Chaire est financé par le Partenariat mondial pour l’éducation (PME) qui, de concert avec le Centre de recherche pour le développement international (CRDI), a créé le Programme KIX afin de partager des connaissances et des innovations dans le domaine de l’éducation. Ce programme a donné naissance à quatre centres régionaux KIX, dont le Centre KIX Afrique 21, mis en place par un consortium composé de la CONFEMEN, de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF).
«Les activités de ces centres visent à soutenir les bonnes pratiques en matière d’éducation autour de thématiques telles que la protection de la petite enfance, l’évaluation des apprentissages, l’égalité des sexes et l’inclusion», observe Patrick Charland.
Le Centre KIX Afrique 21 regroupe 21 pays majoritairement francophones d’Afrique de l’Ouest, du Centre et de l’océan Indien, dont le Sénégal, le Cameroun, le Tchad et la Côte d’Ivoire. C’est ce Centre qui, en partenariat avec la CONFEMEN, a lancé l’appel d’offres international pour l’analyse des programmes d’enseignement au premier cycle du secondaire.
Élaborer des politiques nationales
L’évaluation des apprentissages ne concerne pas seulement l’acquisition par les élèves de connaissances et de compétences. Les données qui en résultent constituent aussi une base sur laquelle les pays peuvent s’appuyer pour élaborer des politiques nationales visant l’amélioration de leur système éducatif. «C’est une chose d’identifier des connaissances à acquérir dans les programmes d’enseignement et c’en est une autre de traduire le tout dans des politiques nationales d’évaluation des apprentissages, indique le professeur. Il s’agit d’éviter les incohérences entre les contenus des programmes et ce sur quoi les élèves sont évalués au niveau national dans un pays donné.»
La plupart des pays d’Afrique francophone, dont certains connaissent une forte croissance démographique, sont en voie de réformer leur système d’éducation, notamment en ce qui concerne l’accessibilité à l’école, la formation des enseignants et la qualité des apprentissages. «Ces réformes sont d’autant plus importantes que les compétences en littératie et en numératie de millions d’enfants africains ne répondent pas aux standards internationaux», souligne Patrick Charland.
Le professeur et son collègue Stéphane Cyr prévoient livrer leur rapport le printemps prochain.