En sciences sociales comme en sciences naturelles, la recherche avec des êtres humains repose sur le principe du consentement libre et éclairé. Afin de recruter des participants, les chercheurs doivent donc leur soumettre un formulaire d’information et de consentement lisible, compréhensible et succinct. «Quand nous écrivons des demandes de subventions ou des articles scientifiques, nous utilisons le jargon en usage dans notre domaine de recherche. Or, dans un formulaire d’information et de consentement, le vocabulaire doit être le plus simple possible», affirme le professeur du Département d’éducation et formation spécialisées Éric Dion, membre du Comité institutionnel d’éthique de la recherche avec des êtres humains (CIEREH) de l’UQAM.
Afin d’aider les chercheurs dans la rédaction du formulaire idéal, le CIEREH a mis en ligne trois modèles simplifiés de formulaires d’information et de consentement. «On observe ailleurs dans le monde une tendance à la simplification des formulaires d’information et de consentement, observe Yanick Farmer, professeur au Département de communication sociale et publique et président du CIEREH. Nous nous sommes appuyés sur la littérature scientifique concernant les meilleures pratiques afin de retenir les éléments essentiels à inclure dans ces formulaires.»
Le CIEREH a mis en ligne un formulaire d’information et de consentement pour les questionnaires anonymes en ligne, un formulaire pour les projets de recherche «classiques» avec des participants majeurs et un formulaire s’adressant au titulaire de l’autorité parentale dans le cas des projets réalisés auprès de participants mineurs.
Selon les sections à remplir, on donne des conseils sur la longueur du texte, on rappelle d’éviter les termes techniques, on suggère des exemples à adapter au besoin ainsi que des clauses à inclure dans le formulaire si elles s’appliquent au projet de recherche.
«Ces formulaires ont fait l’objet d’une consultation et d’une validation auprès de la communauté de recherche de l’UQAM», précise Yanick Farmer.
Le mandat du CIEREH
Par sa politique no 54, l’UQAM adhère à l’Énoncé de politique des trois conseils (IRSC, CRSNG, CRSH) sur l’éthique de la recherche avec des êtres humains. «Cette politique stipule que chaque établissement universitaire doit mettre sur pied un comité d’éthique», souligne la professeure du Département d’organisation et ressources humaines de l’ESG UQAM Julie Cloutier, vice-présidente du CIEREH.
Responsable de l’attribution des certificats d’approbation éthique pour les projets de recherche menés par les professeures et professeurs avec des êtres humains, le CIEREH a pour mandat d’aider les chercheuses et chercheurs à respecter les règles d’éthique. «Le comité, qui compte une quinzaine de membres provenant de toutes les facultés/école, détermine le niveau de risque des projets qui lui sont soumis, s’assure du respect des principes d’éthique, en informe les chercheuses et les chercheurs, et leur fournit l’aide nécessaire pour apporter les correctifs, le cas échéant», précise Julie Cloutier.
Le respect des principes d’éthique touche à la fois la protection du bien-être des participants (on doit s’assurer d’éliminer tous les risques inutiles et évitables) ainsi que le respect des droits des participants en recueillant leur consentement libre et éclairé.
Plus de 200 projets par année
«Contrairement aux autres universités, qui fonctionnent par comités d’éthique sectoriels, l’UQAM a un seul comité, le CIEREH, qui reçoit et évalue toutes les demandes d’approbation éthique soumises par les professeurs, les chargés de cours et les postdoctorants, explique Louis-Philippe Auger, agent de recherche et de planification au Service de la recherche et de la création et coordonnateur du CIEREH. Nous mettons en commun les expertises de tous les membres afin de procéder à la meilleure évaluation possible dans les meilleurs délais.» (Les projets étudiants de maîtrise et de doctorat sont évalués par le Comité d’éthique de la recherche pour les projets étudiants impliquant des êtres humains).
L’an dernier, les membres du CIEREH ont évalué 230 projets de recherche, soit environ une vingtaine de projets par mois. «Nous évaluons à la fois le formulaire de certification éthique, dont les modèles ont été revus à l’été 2021, et le formulaire d’information et de consentement», précise Louis-Philippe Auger.
Déterminer le niveau de risque
Afin de bien évaluer chacun des projets, le comité doit déterminer rapidement le niveau de risque de ceux-ci. «La difficulté est de départager le niveau de risque du sujet d’étude et le niveau de risque du projet comme tel, explique Louis-Philippe Auger. Par exemple, la violence conjugale est un sujet qui, a priori, représente un niveau de risque élevé, mais si le projet de recherche porte sur des intervenants et non sur des victimes, le risque sera peu élevé.»
On a souvent tendance à croire qu’un projet sera évalué rapidement si son niveau de risque est peu élevé. «C’est généralement le cas, mais pas toujours, souligne Yanick Farmer. Si un projet à risque minimal présente un problème de lisibilité ou si ce qui est présenté dans le formulaire de certification éthique ne concorde pas avec le formulaire d’information et de consentement, il y aura des allers-retours entre l’équipe de recherche et le comité, ce qui étirera la période pour obtenir sa certification éthique.»
Un délai raisonnable
Pour favoriser un meilleur délai de traitement, le CIEREH se réunit deux fois par mois. «Cela nous permet de respecter un délai d’environ 4 à 5 semaines à partir de la date de dépôt du projet», note Louis-Philippe Auger. «Ce délai sera toujours trop long pour les personnes impatientes d’amorcer leurs travaux de recherche», reconnaît avec philosophie Éric Dion. Et pour cause: sans certificat éthique, impossible d’avoir accès à ses subventions. «Voilà pourquoi le comité tente de fournir les meilleurs outils à la communauté, poursuit Éric Dion. Puisque l’expérience a démontré que le formulaire d’information et de consentement posait souvent problème lors de l’évaluation des projets, nous avons jugé pertinent de proposer ces trois modèles simplifiés.»
En plus de ces trois modèles, le CIEREH aimerait offrir des modèles en plusieurs langues pour faciliter le recrutement de participants non francophones (un formulaire en anglais existe déjà). «Nous travaillons également sur un modèle avec des pictogrammes pour les personnes à faible littératie», annonce Yanick Farmer.
Une vue d’ensemble pour la communauté
Louis-Philippe Auger se réjouit que les travaux du CIEREH s’inscrivent dans un processus d’amélioration continue. «Nous ne pouvons concevoir un moment dans le temps où les enjeux en éthique de la recherche seront circonscrits, car la recherche évolue sans cesse, observe-t-il. Nous devons nous adapter, par exemple, au développement des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle ou les mégadonnées, qui n’étaient pas aussi répandues ou utilisées il y a 10 ou 15 ans.»
La force du CIEREH, poursuit son coordonnateur, est qu’il possède une vue d’ensemble. «Nous voyons les bons coups dans la manière de présenter les projets et nous pouvons en faire bénéficier l’ensemble de la communauté.»