Geneviève Emond (Ph.D. éducation, 2018)
Titre de sa thèse: «L’apprentissage de la conscience de la corporéité d’enseignantes et de formatrices et ses influences sur la cohérence interne-externe de leur pratique.»
Direction de recherche: Diane Leduc, professeure au Département de didactique, et Marc Boutet, professeur à l’Université de Sherbrooke.
Un peu comme des danseurs ou des comédiennes, les enseignantes et enseignants doivent souvent se mettre en scène. En classe, ils donnent une vraie performance. Et cette performance passe aussi par le corps. La corporéité enseignante, ou l’art d’enseigner en ayant conscience de son corps, c’est le sujet auquel la diplômée Geneviève Emond a consacré sa thèse de doctorat.
L’utilisation du corps est primordiale lorsqu’il s’agit, par exemple, de vulgariser des concepts abstraits ou de donner un cours magistral sans perdre l’attention des élèves. «En enseignement, tout le monde utilise son corps de façon spontanée, mais ce n’est pas tout le monde qui en a vraiment conscience», affirme Geneviève Emond.
La chercheuse s’intéresse à la corporéité – soit la relation d’une personne avec son propre corps, avec le corps d’autres êtres humains et avec son environnement – des enseignants depuis le début des années 2000. «À l’époque, on parlait très peu de l’importance du corps en enseignement, et il n’y avait presque pas de recherche sur ce sujet», rappelle-t-elle.
La recherche et la formation dans le domaine ont beaucoup évolué au cours des dernières années, particulièrement depuis la pandémie. «Enseigner sur Zoom a créé beaucoup de problèmes: fatigue, maux de dos, maux de tête, problèmes psychologiques… Ces défis ont accéléré la demande pour des outils aidant à mieux se sentir en enseignement.»
Dans le cadre de sa thèse de doctorat, Geneviève Emond a étudié les expériences d’apprentissage de la conscience de la corporéité d’enseignantes et de formatrices des niveaux préscolaire et primaire, qu’elle a suivies durant une année scolaire complète. «J’ai choisi de concentrer mes recherches sur le primaire, parce que les enseignants sont physiquement plus près des élèves et les élèves bougent plus à ce niveau, dit-elle. Mais la corporéité touche aussi bien l’enseignement universitaire, collégial, la formation professionnelle, l’éducation des adultes, le milieu communautaire», dit-elle.
La thèse de Geneviève Emond a démontré de nombreux avantages à l’utilisation consciente de son corps: plus d’équilibre dans la pratique, diminution du stress et de l’anxiété, augmentation du plaisir d’enseigner, plus grande facilité à atteindre les objectifs lors d’une situation d’apprentissage. «La corporéité n’apporte pas des bienfaits qu’aux enseignants; plusieurs élèves apprennent mieux dans l’action que s’ils sont assis sur leur chaise», dit la docteure.
Accompagner les enseignants
Geneviève Emond a créé l’entreprise MUZA – Solutions créatives en éducation en 2003. Elle a notamment mis sur pied un projet d’évaluation de bonnes pratiques en éducation pour le Bureau international de l’UNESCO et participé à la création de l’Institut KIUNA, un collège consacré à l’éducation des Autochtones. Depuis 2014, elle s’intéresse plus spécifiquement à l’accompagnement des personnes qui souhaitent améliorer la qualité et la cohérence de leur pratique en enseignement ou en formation.
Durant ses formations, elle propose des exercices qui travaillent, entre autres, l’ancrage (des pieds au sol), l’amplitude (l’ouverture des bras dans tous les axes – des deux côtés, mais aussi en haut, en bas, devant et derrière) – et la relation aux volumes du corps. «Tous les exercices proposés sont liés à la pratique enseignante», souligne la formatrice.
La Formation continue de l’UQAM offre aussi une formation pour s’initier au travail sur la corporéité. La prochaine séance aura lieu le 9 novembre prochain.
Geneviève Emond précise qu’il y a autant de manières d’utiliser son corps que d’êtres humains qui enseignent. «Certains bougent rapidement et de façon plus directe, d’autres plus lentement ou de façon plus spiralée. L’important est de prendre conscience de son corps, que l’on soit en mouvement, assis ou debout.»
Une recherche internationale
Une équipe de l’UQAM, dont fait partie Geneviève Emond, a obtenu au printemps dernier un financement trinational – Canada, France, Suisse – pour étudier la corporéité en pédagogie universitaire.