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L’APP s’exporte dans l’Hexagone

Le bac en biologie en apprentissage par problèmes (APP) bénéficie d’une vitrine sur Unisciel, l’université des sciences en ligne.

Par Marie-Claude Bourdon

28 janvier 2022 à 10 h 01

Mis à jour le 9 juin 2022 à 13 h 09

L’UQAM est la seule université en Amérique du Nord à avoir un partenariat avec Unisciel. Image: Unisciel

Une innovation pédagogique uqamienne, le baccalauréat en biologie en apprentissage par problèmes (APP), bénéficie depuis l’automne dernier d’une vitrine sur Unisciel, l’université des sciences en ligne. Cette plateforme française regroupe plus de 40 universités, écoles ou instituts voués à l’enseignement des sciences. Le professeur associé du Département des sciences biologiques Yves Mauffette, ancien vice-recteur à la Recherche et à la création de l’UQAM et l’un des principaux concepteurs du programme en APP, a créé le site APP/Unisciel en collaboration avec des collègues français. 

L’UQAM est la seule université en Amérique du Nord à avoir un partenariat avec Unisciel. «Cette vitrine est un formidable faire-valoir de notre programme de baccalauréat en APP à l’étranger, souligne le professeur. C’est aussi une belle reconnaissance pour ce programme qui, depuis plus de 25 ans, a largement fait ses preuves.»

L’apprentissage par problèmes, ou APP, est une méthode d’enseignement axée sur la pédagogie active. Au Québec, les programmes de trois facultés de médecine sur quatre sont basés sur l’APP. La méthode est aussi à la base de certains programmes universitaires en nursing et en génie. En sciences pures, toutefois, le programme uqamien est unique.

Lancé en 1996 sous forme de projet pilote, le programme en APP a officiellement remplacé l’ancien programme de baccalauréat en biologie en 1998. Comme les autres programmes du genre, il place les étudiantes et étudiants au centre du processus d’apprentissage. Plutôt que de recevoir des contenus passivement, ces derniers se voient proposer des problèmes – ou ProSitS, dans le langage de l’APP – à résoudre en petits groupes. C’est dans la démarche de résolution des problèmes, par le questionnement, la discussion, le partage d’information et la recherche que les étudiantes et étudiants, guidés par un tuteur (professeur ou chargé de cours), sont amenés à progresser dans leurs apprentissages.

S’il existe, ici et là, des initiatives inspirées de l’APP, le fait que le programme uqamien soit entièrement basé sur l’APP constitue un plus pour la plateforme scientifique française. «D’un point de vue pédagogique, cela procure une vision d’ensemble cohérente, tout en montrant les avantages de l’apprentissage par problèmes», souligne le secrétaire général d’Unisciel, Manuel Majada. 

Yves Mauffette, ambassadeur de l’APP

Depuis plusieurs années, Yves Mauffette est devenu un ambassadeur de l’APP en France, où il a donné de nombreuses conférences sur le sujet, non seulement à ses collègues biologistes, mais aussi dans des domaines comme l’architecture de paysage et le génie. Il a notamment travaillé avec le CESI, une école d’ingénieurs comptant plusieurs campus, pour développer un programme d’informatique basé sur la démarche APP. C’est grâce à cette collaboration qu’il a été approché par Manuel Majada pour démarrer un projet commun.

UNISCIEL s’adresse autant aux enseignants qu’aux étudiants, mettant à leur disposition une foule de ressources numériques en sciences. La plateforme a pour objectif, notamment, de favoriser la production et le partage de ressources et d’innovations pédagogiques. C’est dans ce contexte que s’inscrit la vitrine sur l’APP. Le site propose des exemples de ProSits (avec, dans chaque cas, le module enseignant et le module étudiant), des guides pour la rédaction d’un ProSit ou pour l’animation d’un tutorat.

Mutualisation future

Ces contenus produits par l’UQAM sont une mine d’or pour Manuel Majada. En effet, si chaque enseignant qui adopte l’APP doit créer ses propres cas, cela peut devenir lourd et constituer un frein au développement de l’approche. En donnant accès aux ProSits uqamiens, Unisciel permet à des enseignants en France de s’en inspirer pour en produire de nouveaux. «L’idée, dit le secrétaire général, c’est de créer une collection de problèmes accessible à tous, que chaque enseignant pourrait réutiliser à l’adaptant à son contexte particulier. Cette mutualisation future sera un gage de succès pour le site.»

Chez Unisciel, on souhaite que le site APP contribue à vaincre la résistance des enseignants français vis-à-vis des approches de pédagogie active. «L’APP répond à un besoin croissant de développer, dans l’enseignement, une démarche davantage axée sur les compétences», dit Manuel Majada, ajoutant que les étudiants sont de moins en moins satisfaits par les approches traditionnelles.

«Pour les Français, qui ont un rapport avec l’autorité de l’enseignant très différent de chez nous, l’approche APP fait un peu peur, observe Yves Mauffette. Mais on constate de plus en plus d’intérêt pour la pédagogie active.»

Le site Unisciel/UQAM offre quelques vidéos de témoignages. La diplômée Aimée Chevalier (B.Sc. biologie, 2007), responsable qualité, sécurité et développement durable chez Lyreco, une société française de distribution de produits et services pour les environnements de travail, a fait une partie de sa formation en France et une partie à l’UQAM. Elle souligne la différence entre l’apprentissage par problèmes, qui se fait en petites équipes, et les cours magistraux donnés dans les grands amphithéâtres français. Pour elle, l’APP est un processus d’apprentissage beaucoup plus stimulant. «À la limite, on apprend par le jeu, dit la jeune femme avec un enthousiasme communicatif. On a une énigme et il faut trouver la solution!»

Professeure en biologie à l’Université de Montpellier, Patricia Cucchi a adopté l’approche APP pour mieux soutenir ses étudiants. Selon elle, les jeunes enseignants ont une volonté de changer d’approche. «Ce sont, pour moi, deux gros facteurs de motivation: donner du sens aux enseignements et faire en sorte que les étudiants soient beaucoup plus actifs dans leurs apprentissages.» 

L’automne dernier, l’Université de Montpellier a lancé un programme de licence (l’équivalent du bac) APP-Bio inspiré de celui de l’UQAM, avec une première cohorte d’une quarantaine d’étudiants. «C’est une source de fierté pour nous, dit Yves Mauffette, car l’UQAM est vue comme un pilier de cette pédagogie en sciences.»

Nouvelles collaborations

Ce nouveau programme à l’Université de Montpellier ouvre la porte à de nombreuses collaborations, note le professeur. «Nous pourrons proposer aux étudiants français de venir en échange à l’UQAM en troisième année et vice-versa. On pourrait même envisager une diplomation conjointe.» Un projet semblable existe à l’Université de Toulouse, où Yves Mauffette a déjà offert ses services pour mettre sur pied un programme de master offert en partie en APP.

Avec la vitrine maintenant offerte par Unisciel, le professeur espère que ce genre d’initiatives pourra se multiplier. «La plateforme nous offre une belle visibilité, observe-t-il. C’est stimulant pour la nouvelle garde du département qui souhaite s’impliquer en pédagogie. On cherche souvent à se faire reconnaître pour nos innovations en recherche, mais l’innovation en enseignement, c’est aussi au cœur de la mission de l’UQAM.»

La France à l’UQAM

De nombreuses autres collaborations unissent la France et l’UQAM. Il en est question lors de la deuxème édition de l’événement La France à l’UQAM. Mobilité, liberté et inclusion, qui se déroulera virtuellement du 1er au 3 février.