Voir plus
Voir moins

Rompre avec l’inertie climatique

Le mouvement environnemental doit proposer des modèles de développement différents de celui fondé sur la croissance infinie.

Série

Acfas 2022

Par Claude Gauvreau

3 mai 2022 à 9 h 05

Mis à jour le 9 juin 2022 à 13 h 08

Série Acfas 2022
Plusieurs scientifiques de l’UQAM proposent des colloques dans le cadre du congrès virtuel organisé par l’Université Laval du 9 au 13 mai.

Puits de pétrole en Alberta.
Photo: Getty/Images

Devant l’urgence de combattre la crise écologique, comment contrer les forces de l’inertie? Comment développer des actions qui permettront de bousculer le statu quo? Ces questions seront au centre des discussions lors du colloque «Faire l’écologie sociale de l’inertie climatique» (11-12 mai), co-organisé par le professeur du Département de sociologie Éric Pineault et la doctorante en sociologie Joanie Ouellet.

«Depuis au moins trois décennies, les sociétés contemporaines font l’expérience de la crise environnementale sous deux grandes formes; le réchauffement climatique et la perte de la biodiversité», rappelle Éric Pineault, qui est aussi directeur scientifique de l’Institut des sciences de l’environnement et du Pôle sur la ville résiliente. «Aujourd’hui, poursuit-il, on observe une prise de conscience grandissante de la gravité de ces enjeux, mais aussi une exacerbation des problèmes environnementaux. Le colloque se penchera sur les verrous économiques et politiques qui empêchent d’agir.» Ces verrous, précise le professeur, renvoient notamment aux investissements privés et aux décisions publiques qui limitent la capacité de transformer radicalement nos modes d’organisation et de production, lesquels reposent toujours sur la consommation massive d’énergies fossiles.

Le gouvernement Trudeau a dévoilé récemment un plan de lutte contre la crise climatique, qui prévoit d’investir plus de neuf milliards de dollars pour engager le Canada dans la voie de la carboneutralité d’ici 2050. «L’atteinte de cet objectif se heurte à l’inertie des industries pétrolière et gazière ainsi que du secteur des transports, principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre (GES)», indique Éric Pineault. Cette inertie, ajoute-t-il, est alimentée par le gouvernement fédéral. Celui-ci vise à réduire de 40 % les émissions de GES par rapport au niveau de 2005 d’ici la fin de la décennie, mais les industries des énergies fossiles et le secteur du transport se voient attribuer une cible de réduction inférieure (31 %) à ce qui incombe au reste de l’économie canadienne. Pourquoi?

«L’État canadien est un État pétrolier, soutient le chercheur. Les élites politiques sont liées aux quatre grandes entreprises extractives d’hydrocarbures et aux cinq grandes banques canadiennes qui financent ces entreprises. Au fond, Ottawa souhaite préserver la compétitivité du secteur pétrolier canadien.»

Le colloque abordera la question des transformations sociales nécessaires pour rompre avec l’inertie climatique. «Nous sommes devant un impératif de changement systémique, affirme Éric Pineault. Nous devons réfléchir au rôle d’une planification économique démocratique basée sur la concertation et ancrée dans des collectivités locales – villes, quartiers –, auxquelles on donnerait des moyens pour agir sur leur développement.»

Pour assurer une transition socio-écologique vers une économie affranchie des énergies fossiles, le mouvement environnemental doit «établir de larges coalitions et proposer des modèles de développement différents de celui fondé sur la croissance infinie, dont nous avons atteint les limites biophysiques», conclut le chercheur.