Série En vert et pour tous
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«Le changement climatique se produit à l’échelle globale, il est rapide et il s’intensifie», affirme le professeur du Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère Alejandro Di Luca (Ph.D. sciences de la Terre et de l’atmosphère, 2012). Spécialiste de la modélisation régionale et des événements climatiques extrêmes, Alejandro Di Luca compte parmi les auteurs principaux du sixième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), dont le premier volet a été publié le 9 août.
Avec le Groupe de travail I du GIEC, Alejandro Di Luca travaille depuis 2018 sur la rédaction de ce sixième rapport intitulé Changement climatique 2021 : les éléments scientifiques.
«Les changements que nous observons sont sans précédent sur des milliers, voire des centaines de milliers d’années, note le chercheur. Par exemple, une augmentation des températures telle que celle qui a été enregistrée depuis 50 ans, cela est inédit depuis des milliers d’années.»
Le rapport fournit de nouvelles estimations de la possibilité que le réchauffement planétaire excède 1,5 °C au cours des prochaines décennies et fait valoir qu’à moins de réductions immédiates, rapides et massives des émissions de gaz à effet de serre, la limitation du réchauffement aux alentours de 1,5 °C, ou même à 2 °C, sera hors de portée.
«Le rapport démontre une fois de plus que le changement climatique est relié à l’influence humaine, souligne le professeur. Il faut qu’on réduise nos émissions de gaz à effet de serre de manière draconienne, sinon l’objectif que nous nous sommes fixé de limiter le changement climatique ne sera pas atteint.»
Avec une hausse de 2 °C, les chaleurs extrêmes atteindraient plus souvent des seuils de tolérance critiques pour l’agriculture et la santé publique, peut-on lire dans le communiqué du GIEC. Et les effets de l’évolution du climat ne se limitent pas à la température. De nombreux changements, qui varient selon les régions, concernent le régime des pluies, les sécheresses et les inondations. Les zones côtières sont confrontées à l’élévation du niveau de la mer et à l’érosion du littoral. Dans l’Arctique, où le changement climatique excède le double de la moyenne mondiale, la poursuite du réchauffement accentue le dégel du pergélisol, la fonte des glaciers et de la calotte glaciaire. Les écosystèmes marins sont affectés par la fréquence des vagues de chaleur marine, par l’acidification et la baisse de teneur en oxygène. Les villes sont davantage exposées aux épisodes de chaleur et, sur les côtes, aux inondations.
Le sixième Rapport offre pour la première fois une évaluation régionale poussée du changement climatique. Alejandro Di Luca a mené des recherches sur la modélisation du climat en Argentine, son pays natal, en Australie, où il a travaillé pendant plus de sept ans avant de joindre l’UQAM, en octobre 2020, et il s’intéresse maintenant à l’Est du Canada. En tant que contributeur du GIEC, il a pris la relève de son directeur de maîtrise et de doctorat, René Laprise, professeur au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère, lui-même spécialiste de la modélisation des changements climatiques et l’un des auteurs principaux du quatrième rapport du GIEC.
Peut-on encore donner le coup de barre nécessaire pour freiner l’accélération du changement climatique? «C’est possible, répond Alejandro Di Luca. Le rapport montre que les actions humaines peuvent encore déterminer l’évolution du climat, selon le type d’énergie qu’on utilisera dans l’avenir et la croissance de la population. Mais il faut prendre des mesures radicales, rapidement. Est-ce qu’on le fera? C’est une autre question, que le rapport n’aborde pas.»
Le Groupe de travail I du GIEC compte 234 auteurs, représentant 66 pays, dont 31 auteurs coordonnateurs et 167 auteurs principaux.
Alejandro Di Luca s’intéresse dans ses recherches aux événements climatiques extrêmes –cyclones, températures et précipitations extrêmes –, sujet du chapitre 11 du rapport. Il est aussi spécialiste de la modélisation, membre du Centre pour l’étude et la simulation du climat à l’échelle régionale (ESCER). Le Centre ESCER a récemment reçu une aide financière de 900 000 dollars du gouvernement du Québec pour développer une nouvelle génération du modèle régional de simulation du climat à très haute résolution spatiale. Il existe seulement une demi-douzaine de modèles de ce type dans le monde et aucun au Canada.