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Zoom en musique

Des évaluations finales par vidéoconférence permettent aux étudiants en musique de terminer leur session… sans fausse note!

Par Pierre-Etienne Caza

24 avril 2020 à 9 h 04

Mis à jour le 28 avril 2020 à 11 h 04

Série COVID-19: tous les articles
Les nouvelles sur la situation à l’Université entourant la COVID-19 et les analyses des experts sur la crise sont réunies dans cette série.

L’étudiant Louis Marchand lors de son évaluation finale par Zoom avec la professeure Isabelle Héroux.

Grâce à la vidéoconférence, les étudiants en musique de l’UQAM ont terminé leur trimestre d’hiver sans fausse note. «Nous avons procédé aux évaluations finales par l’intermédiaire du logiciel Zoom et cela s’est bien déroulé», affirme la directrice du Département de musique Isabelle Héroux. Professeurs, chargés de cours et animateurs pédagogiques ont trouvé des façons de réaliser les évaluations à distance pour tous les cas de figure: cours d’instrument individuel, cours d’instrument en groupe et cours de chant avec musiciens accompagnateurs.

Des enregistrements essentiels

La vidéoconférence permet d’évaluer certains éléments plus facilement que d’autres, indique toutefois Isabelle Héroux, qui enseigne la guitare classique. «Avec Zoom, on peut entendre le phrasé, voir les gestes sur l’instrument, mais nous ne pouvons pas discerner certains détails sonores comme les changements de timbre. S’il n’y a pas un micro et une carte son entre l’instrument et Zoom, le son est souvent saturé.»

Zoom ou FaceTime fonctionnent avec un algorithme qui traite et compresse les sons, explique la professeure. «Ces logiciels ont plus de difficulté à capter et à transmettre la richesse des instruments polyphoniques, comme la guitare ou le piano.» Voilà pourquoi elle a demandé à ses étudiants de lui faire parvenir un enregistrement pour qu’elle puisse compléter leur évaluation. «Même un enregistrement avec un téléphone cellulaire sonne mieux qu’un Zoom en direct. Je l’écoute et je peux ensuite leur donner une rétroaction sur leur prestation», dit-elle.

Sa collègue Dominique Primeau, qui enseigne le chant populaire, a procédé de la même manière. «J’ai évalué mes étudiants en direct pour la lecture à vue, mais selon la qualité de la connexion Internet, il y a toujours une période de latence, note-t-elle. J’ai demandé aux étudiants de me faire parvenir un enregistrement pour compléter leur évaluation, et j’ai suggéré que nous diffusions ces enregistrements sur la page Facebook du département comme s’il s’agissait d’une représentation officielle.»

L’étudiante Amylie Poirier-Théberge lors de son évaluation finale avec la professeure Dominique Primeau. 

Évidemment, la qualité du son dépend en premier lieu de l’acoustique de l’endroit où l’on joue… et de la nature même de l’instrument. «J’ai un ami qui enseigne au cégep et qui a abandonné l’idée d’évaluer à distance ses étudiants en trompette, car c’était trop cacophonique», raconte Dominique Primeau.

Plusieurs pistes à mixer

Lors de leurs évaluations, les chanteurs et chanteuses sont habituellement accompagnés par des musiciens: un piano, une basse, une batterie, une guitare et un ou des choristes, souligne Dominique Primeau. «Chacun a enregistré sa piste à la maison et le chargé de cours Pierre Bélisle a mixé le tout, puis a fait parvenir l’accompagnement au chanteur ou à la chanteuse», explique-t-elle.

On a utilisé le même processus pour les cours d’instrument en groupe. «Jouer en simultané, comme on l’a vu sur les réseaux sociaux depuis le début de la crise, demande une connexion et des équipements comme les gamers en utilisent afin d’éliminer les effets de latence, explique Isabelle Héroux. Puisque c’était impossible, les étudiants ont enregistré leur piste respective sur leurs appareils: téléphone, carte son, ordinateur portable. Certains ont même participé à la réalisation des mixages, même si ce n’est habituellement pas au programme. C’était en quelque sorte une plus-value à leur formation!»

Un projet pour l’IA ?

L’ingéniosité et la capacité d’adaptation des étudiants, des professeurs et des animateurs pédagogiques aura permis de clore le trimestre d’hiver en beauté, tout en ouvrant peut-être de nouveaux champs de recherche. «S’enregistrer à la maison en chantant sur un accompagnement ne permet pas une grande flexibilité au niveau des tempos, observe Isabelle Héroux. Ce n’est pas optimal comme prestation, car on ne retrouve pas ces moments magiques pendant lesquels les musiciens s’ajustent à l’interprétation du chanteur ou de la chanteuse au gré de la pièce. Si les chercheurs en intelligence artificielle pouvaient développer un accompagnement musical capable de s’adapter aux variations de l’interprète, ce serait génial.» Avis aux intéressés!