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L’alimentation en 2045

La sociologue Louise Vandelac et ses collaborateurs présenteront, en 2021, une deuxième série de résultats de leur recherche sur les scénarios alimentaires.

Par Magalie Masson

27 juillet 2020 à 9 h 07

Mis à jour le 12 août 2020 à 10 h 08

L’agriculture intensive est responsable de près de 25% de l’ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre, selon un rapport du GIEC publié en 2014. Photo: Marie-Claude Bourdon

Pourquoi les scénarios alimentaires de 2045 ? «Parce qu’il faut absolument avoir modifié notre trajectoire d’ici là, et parce que ça nous donne un certain moment pour agir», affirme la professeure au Département de sociologie Louise Vandelac. La recherche commandée par la chercheuse et ses collaborateurs s’intéressent aux limites planétaires et sociales des systèmes agroalimentaires. «La demande croissante pour la viande combinée à la multiplication des sécheresses et des inondations nous conduisent tout droit vers un mur. Si on continue comme on le fait actuellement, on risque d’être dans des situations insoutenables», soutient la chercheuse. Lancé le 1er mars 2019, le projet de recherche sur les scénarios alimentaires à l’horizon de 2045 présentera une deuxième série de résultats en janvier 2021.

Financée en partie par le Conseil de recherche en sciences humaines (CRSH), l’étude a pour but d’éclairer les décisions publiques au sujet de l’industrie agroalimentaire. Les chercheurs conduisent l’étude en assumant qu’il n’y aura pas de changements majeurs dans l’industrie d’ici les 25 prochaines années. Ils ont fait ce choix puisqu’il s’agirait de la trajectoire la plus dominante à ce jour, affirme Louise Vandelac.

La recherche s’appuie sur une littérature scientifique et documentaire ainsi que sur une série d’entretiens menés avec des acteurs de l’agro-industrie mondiale, soit des instances gouvernementales, des compagnies et des paysans. L’équipe de Louise Vandelac s’intéresse aussi à l’évolution des technologies, déterminantes dans l’industrie agroalimentaire.

La première série de résultats présentée en 2019 se concentrait sur l’utilisation des pesticides et herbicides, notamment le glyphosate, qui fait l’objet de plus de 100 000 poursuites judiciaires aux États-Unis. En 2017, le gouvernement canadien a reconduit l’autorisation de la vente de l’herbicide jusqu’en 2032.

Selon la professeure Louise Vandelac, on ne se soucie pas assez des conséquences de l’agriculture intensive. L’utilisation de pesticides empoisonne la faune et la flore et contamine les nappes phréatiques. L’agriculture intensive contribue aussi à la déforestation en raison des besoins de surfaces agricoles et est responsable de près de 25% de l’ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre, selon un rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publié en 2014. «On oublie qu’il y a un enjeu de transition à réaliser dans le secteur de l’alimentation. On parle beaucoup de la transition énergétique et de celle des transports, mais il y a un urgent besoin d’envisager de nouvelles stratégies agroalimentaires», explique la sociologue. Elle se réjouit de constater que des efforts sont faits, individuellement, pour consommer des produits locaux, mais convient que des politiques publiques plus marquées sont nécessaires. «Se porter à la défense de l’environnement, c’est vouloir maintenir les conditions pour que notre planète demeure habitable. Je pense que les jeunes qui se mobilisent dans les rues ont absolument raison de dire “cessez de jouer avec notre avenir”. C’est lié à la préoccupation de défendre le bien commun et ça, tout le monde le comprend et devrait s’en soucier», soutient Louise Vandelac.