Série COVID-19: tous les articles
Les nouvelles sur la situation entourant la COVID-19 à l’Université et les analyses des experts sur la crise sont réunies dans cette série.
Au moment où un premier cas probable d’infection a été identifié au Québec, une soixantaine de pays, outre la Chine, sont maintenant touchés par le COVID-19, nom donné au nouveau coronavirus. Celui-ci a engendré jusqu’à maintenant au-delà de 89 000 cas de contamination et plus de 3 000 décès dans le monde, selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
«Avec l’augmentation quotidienne des cas de contamination, on peut prévoir que l’on parlera bientôt de pandémie», a soutenu Cécile Tremblay, microbiologiste infectiologue au CHUM, lors de la conférence «Coronavirus en Chine: la gestion d’une crise de santé mondiale sous la loupe», organisée par l’Institut d’études internationales de Montréal (IEIM) en collaboration avec l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaire (OCCAH).
Tenue à l’UQAM le 25 février dernier, la conférence était animée par le professeur du Département de management et technologie François Audet, directeur de l’IEIM et de l’OCCAH. Elle réunissait également le professeur du Département des sciences économiques Julien Martin, titulaire de la Chaire de recherche sur l’impact local des firmes multinationales (CRILFM), et Guy Saint-Jacques, fellow de l’IEIM et ancien ambassadeur du Canada en Chine. Une captation vidéo de l’événement est disponible sur la page Facebook de l’OCCAH.
Les leçons du SRAS
L’état des infrastructures de santé et de préparation des organismes de santé publique, qui varie d’un pays à l’autre, est un facteur clé dans la lutte contre toute forme d’épidémie, a rappelé Cécile Tremblay. «Au Canada, nous avons tiré des leçons de la crise du «syndrome respiratoire aigu sévère» (SRAS) survenue en 2003. Quand on fait face à un nouveau virus, les premières personnes les plus à risque, outre celles qui sont en contact direct avec la source de contamination, sont les membres du personnel de la santé.»
Dans les hôpitaux et les cliniques, des mesures d’urgence ont été mises en place pour gérer les cas de personnes présentant des symptômes afin de limiter les possibilités de transmission. «L’expérience acquise par l’OMS nous enseigne qu’il faut cibler les personnes ayant été en contact prolongé avec des individus contaminés, d’où les efforts déployés au Canada et ailleurs pour retracer ces personnes», a précisé l’infectiologue.
Selon Cécile Tremblay, le système médical chinois a été alerte, plus de 80 essais cliniques sur différents médicaments sont présentement en cours en Chine et des essais de phase1devraient être entrepris en avril pour mettre au point un premier vaccin. «Il s’agit d’un vaccin développé pour le SRAS qui a été modifié pour le nouveau coronavirus.»
Chez les humains, sept coronavirus ont été reconnus dans le monde, dont quatre s’apparentent à un rhume ordinaire. «Les trois autres, apparus au cours des 20 dernières années, ont fait l’objet d’une attention particulière parce qu’ils causaient un syndrome de détresse respiratoire sévère», a rappelé la chercheuse.
Le coronavirus s’attaque à tout le monde, enfants comme adultes. Mais comme pour l’influenza, les personnes âgées et celles souffrant déjà de maladies chroniques, notamment, sont plus à risque de connaître des complications. Le taux de mortalité associé à une infection au COVID-19 serait de 2,3 % comparé à 9,6 % pour le SRAS.
Cela dit, il demeure difficile d’établir avec précision le taux de létalité du coronavirus – soit le nombre de personnes qui meurent de la maladie par rapport au nombre de personnes qui en sont atteintes –, car on ne sait pas encore combien d’individus ont été réellement infectés. «De nombreuses personnes ayant des symptômes bénins n’ont probablement pas consulté et n’ont donc pas été comptabilisées dans les statistiques, a observé l’infectiologue. De plus, il est compliqué pour la Chine de fournir des chiffres exacts, notamment dans les régions rurales où le système de santé demeure rudimentaire.»
Un site à l’UQAM sur le coronavirus
Une page web intitulée «Info coronavirus» a été mise en ligne par l’UQAM. On y retrouve principalement les plus récentes communications de la Direction avec la communauté universitaire sur le sujet.
Le 28 février dernier, la Direction indiquait dans un message à la communauté qu’à la suite du signalement d’un premier cas probable de coronavirus (COVID-19) au Québec la veille, elle prenait «les mesures nécessaires pour se préparer à toute éventualité.»
Depuis janvier dernier, toutes les activités académiques en Chine, dont les échanges de mobilité étudiante, ont été suspendues jusqu’à nouvel ordre. Cette directive a été étendue à la Corée du Sud, à l’Italie du Nord et à l’Iran. Aucun déplacement dans ces régions du monde n’est cautionné par l’Université. D’autres destinations pourraient être ajoutées à la liste selon l’évolution de la situation.
Cette page web sera bonifiée selon les développements en lien avec l’épidémie de coronavirus.
Impacts économiques
Au cours des derniers jours, les grands indices boursiers ont affiché des baisses allant de 1,5 % à plus de 4 %. Le climat d’incertitude causé par la crise sanitaire affecte de manière importante les prises de décision des autorités politiques, des entreprises, des investisseurs et des ménages, a souligné Julien Martin. «Les mesures de restriction à la mobilité, par exemple, qui se sont avérées efficaces pour endiguer la propagation du virus, ont des conséquences économiques importantes, notamment dans les secteurs du tourisme et du transport, aérien comme ferroviaire», a fait remarquer l’économiste.
«Alors que 145 millions de Chinois voyagent chaque année à l’étranger, plus de 130 pays ont imposé des restrictions à l’arrivée de touristes chinois ou de personnes ayant visité récemment la Chine», a noté Guy Saint-Jacques. «Les touristes chinois, qui ont tendance à voyager sur des périodes assez longues, représentent une manne économique pour plusieurs pays comme le Canada, les États-Unis et la France», a renchéri Julien Martin. Par ailleurs, le fait que des gens ne puissent pas se déplacer et travailler, que l’on ferme certaines entreprises ou certains services, a forcément un impact sur la production.
Un autre effet économique important concerne les chaînes de valeurs mondiales, soit les chaînes de production de biens fragmentées à travers un grand nombre de pays. «Il suffit qu’un problème survienne à un endroit pour que cela affecte l’ensemble de la production, a noté l’économiste. Or, la Chine est l’un des nœuds les plus importants de la chaîne.» La Chine occupe maintenant une place beaucoup plus importante dans l’économie mondiale qu’à l’époque du SRAS, a ajouté Guy Saint-Jacques. «En 2003, ce pays comptait pour environ 4 % du PIB mondial, contre 17 % aujourd’hui.»
Dans un régime autoritaire comme celui de la Chine, personne ne veut être porteur de mauvaises nouvelles ou prendre des décisions impopulaires, a rappelé l’ancien ambassadeur. «Les autorités chinoises ont injecté 174 milliards de dollars US dans l’économie et ont baissé les taux d’intérêt. Sur le plan côté politique, les dirigeants du Parti communiste et des fonctionnaires locaux ont été sévèrement critiqués pour leur contrôle exercé sur la circulation de l’information afin de calmer la grogne.»
En guise de conclusion, Cécile Tremblay s’est voulue rassurante. «La peur est plus contagieuse que le virus, a-t-elle déclaré. Ce qui guide le type de réponse à apporter à une épidémie, c’est notre perception du risque. Or, on oublie que la grippe saisonnière est une menace plus réelle au Canada. Depuis novembre 2019, 1 500 personnes sont mortes à cause de l’influenza.»