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Conduites suicidaires chez les ados

Des chercheurs de l’UQAM collaborent à un numéro spécial de la revue française Perspectives Psy. 

Par Claude Gauvreau

8 septembre 2020 à 13 h 09

Mis à jour le 8 septembre 2020 à 13 h 09

Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la santé, paru en 2014, le suicide faisait partie des trois principales causes de décès chez les jeunes.
Photo: Getty/Images

Plusieurs professeurs du Département de psychologie, dont Catherine Herba, Réal Labelle, Diane Marcotte, Brian Mishara et Michel Tousignant, ont collaboré à un numéro spécial de la revue française Perspectives Psy consacré à la dépression et aux conduites suicidaires à l’adolescence. Paru en août dernier, ce numéro propose une série d’articles rédigés par des chercheurs canadiens à partir d’exposés présentés au colloque franco-canadien de psychiatrie et de psychopathologie tenu à l’UQAM en juillet 2019.

«Ce colloque a constitué l’aboutissement d’un an de travail collectif impliquant le Centre de recherche et d’intervention sur le suicide, enjeux éthiques et pratiques de fin de vie (CRISE), basé à l’UQAM, et le Groupe français d’étude de psychiatrie, psychologie et sciences sociales (GEPPSS)», rappelle Réal Labelle.

Fondée en France en 1963 par le GEPPSS, Perspectives Psy est une des revues phares de la communauté psychiatrique francophone. «Possédant un rayonnement international, elle s’est imposée au fil du temps comme une publication de référence dans le champ de la psychiatrie, de la psychologie clinique et des sciences sociales, note le professeur. La majorité des départements de psychiatrie dans les universités de la Francophonie y sont abonnés.»

Dans son numéro spécial, Perspectives Psy présente de articles portant, notamment, sur les symptômes dépressifs et les pensées suicidaire chez les adolescents canadiens, sur le programme Zenétudes, qui vise à diminuer le risque d’émergence de la dépression et de l’anxiété lors du passage à l’âge adulte, ainsi que sur les programmes Passeport: s’équiper pour la vie et Les amis de Zippy, qui proposent des stratégies de gestion du stress et de l’anxiété adaptés aux jeunes.

Un rapport de l’OMS

En 2014, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un rapport sur la santé des adolescents dans le monde. On y soulignait que la dépression était le trouble de santé mentale le plus fréquent dans cette tranche d’âge et que le suicide faisait partie des trois principales causes de décès chez les jeunes. Le rapport soulignait enfin que le risque suicidaire chez l’adulte augmentait lorsqu’il y avait eu des antécédents de dépression à l’adolescence.

«Un rapport de l’UNICEF, qui vient de paraître, rappelle que le Canada est l’un des pays où le taux de suicide chez les jeunes demeure le plus élevé, observe Réal Labelle. Cela dit, nous avons progressé ces dernières années, notamment au Québec, en matière de prévention auprès des adolescents et dans l’offre de programmes de psychothérapie.»

Selon le psychologue, on doit toutefois poursuivre les efforts pour élargir l’accès à ces programmes. Plusieurs spécialistes en suicidologie militent, par ailleurs, pour une nouvelle politique nationale en matière de prévention du suicide. «On doit créer des équipes mobiles d’urgence – sortes de cellules de crise – dans l’ensemble des hôpitaux», affirme l’expert.

Faible estime de soi

Dans le dernier numéro de Perspectives Psy, le professeur cosigne un article soulignant que la faible estime de soi apparaît associée aux pensées suicidaires et qu’il faut miser sur une prévention axée sur l’apprentissage de compétences psychosociales.

«Nous nous sommes basés sur les résultats d’une étude réalisée sur trois ans à partir d’un vaste échantillon d’adolescents canadiens. On s’est aperçu que lorsqu’on intervient très tôt auprès des enfants et des adolescents pour les aider à gérer leurs émotions et leur stress, cela leur procure un sentiment de contrôle, lequel peut avoir un impact positif sur leur estime de soi. L’étude souligne également l’importance des réseaux de soutien social, dont font partie les parents et les enseignants dans les écoles, lesquels ont besoin d’être bien outillés.»

Deux approches différentes

Selon Réal Labelle, les chercheurs français et les chercheurs québécois et canadiens ont des approches différentes dans la lutte contre le suicide. «En France, on ne peut faire abstraction de l’héritage de la psychanalyse, qui exerce une forte influence sur les façons de faire. On est beaucoup dans un mode d’écoute et on privilégie les groupes de parole pour mieux comprendre les causes des pensées et des conduites suicidaires. Dans le contexte nord-américain, marqué par le pragmatisme, l’accent est mis davantage sur les meilleures façons d’agir pour prévenir le suicide. Chacune des deux approches comporte des avantages et des limites, d’où l’intérêt d’établir un dialogue entre elles.»

Le numéro spécial de la revue Perspectives Psy est disponible au centre de documentation du CRISE. Au début de 2021, la revue publiera un autre numéro spécial qui contiendra les articles des chercheurs français ayant participé au colloque de 2019 à l’UQAM.