Série Prix Reconnaissance UQAM 2019
Sept diplômés de l’UQAM seront honorés à l’occasion de la Soirée Trajectoires 2019 pour leur cheminement exemplaire et leur engagement. Ce texte est le premier d’une série de sept articles présentant les lauréats.
Une rencontre déterminante peut parfois orienter le parcours d’une vie. Pour Catherine Légaré (Ph.D. psychologie, 05), cette étincelle s’est produite lors d’une «journée carrière» organisée par son école secondaire. «J’ai assisté à la conférence d’une psychologue et j’ai su que je voulais étudier dans ce domaine», se rappelle la présidente et fondatrice d’Academos, une plateforme web qui permet à des jeunes de 14 à 30 ans de dialoguer avec des mentors exerçant le métier qu’ils veulent faire ou avec des étudiants du domaine qui les intéresse.
L’expression anglaise early adopter désigne un individu prompt à adopter une nouvelle technologie. Elle sied bien à Catherine Légaré, qui tapait déjà ses travaux à l’ordinateur à l’école secondaire, à la fin des années 1980. Quand le web et le courriel sont apparus quelques années plus tard, l’étudiante à la maîtrise en psychologie s’est convertie sur-le-champ. «Je pouvais consulter un article d’un chercheur de l’Université Stanford, en Californie, lui écrire un courriel et il me répondait! Les possibilités de ces nouveaux outils me fascinaient», se souvient-elle.
À l’époque, Catherine Légaré enseignait l’informatique à temps partiel aux personnes de 50 ans et plus au Collège de Bois-de-Boulogne. «Ces “aînés” voulaient s’impliquer au collège et c’est en discutant avec les responsables du Service d’orientation que l’idée de les jumeler avec des élèves a germé», raconte-t-elle. Créée en 1999, la plateforme Academos est devenue son projet doctoral, réalisé sous la direction du professeur Jacques Lajoie, «l’un des rares chercheurs au Québec qui travaillaient sur les aspects sociaux de l’usage d’internet».
La première année, le projet regroupait une centaine de jeunes et 70 mentors. «Le nombre d’utilisateurs a grimpé en flèche, puis des élèves hors du Collège en ont entendu parler et ont voulu s’y inscrire», se souvient la fondatrice. En 2011, Academos devient une organisation à but non lucratif, se détache du Collège de Bois-de-Boulogne et déménage dans de nouveaux locaux, rue Saint-Antoine Est.
L’organisation, qui célèbre cette année son 20e anniversaire, compte plus de 100 000 jeunes de 14 à 30 ans inscrits sur sa plateforme mobile et collabore avec plus de 510 écoles. Les élèves ont accès à une banque de plus de 2800 mentors dans tous les domaines, partout au Québec: plombier, expert en balistique, sculpteur, pompière, travailleuse sociale, etc. Tous les échanges ont lieu par courriel, sous la surveillance d’Academos, qui ne procède à aucun jumelage. «Les jeunes sont invités à faire des recherches sur le site et à contacter les mentors qui les intéressent pour leur poser des questions», précise la présidente. Les moins de 18 ans utilisent un pseudonyme et un avatar.
En étudiant les conditions de réussite des programmes de mentorat pour sa thèse, Catherine Légaré en était venue à la conclusion que «ses aînés» n’étaient pas les personnes les mieux placées pour conseiller des adolescents. «Les jeunes préfèrent des mentors plus jeunes, plus près d’eux en matière d’expérience de vie et encore actifs dans le milieu professionnel», explique-t-elle. L’âge moyen des mentors sur la plateforme est de 40 ans et le taux de roulement est très faible, car ils apprécient leur rôle. «Qui n’aime pas parler de son travail?», demande la présidente.
Certains mentors sont toutefois plus difficiles à recruter. Voilà pourquoi Catherine Légaré a eu l’idée de lancer la Coalition Academos pour la persévérance scolaire, à laquelle participe l’UQAM et qui vise à bonifier et à diversifier l’offre de mentors qu’Academos met à la disposition des jeunes. «Les médecins, généralistes et spécialistes, sont très en demande et difficiles à recruter», remarque-t-elle. Signe des temps, Academos cherche présentement des mentors œuvrant en intelligence artificielle et en cyberscurité.
Les personnes diplômées de l’UQAM qui souhaitent devenir mentors sont les bienvenues, peu importe leur domaine, ajoute-t-elle. «Tout spécialement celles qui travaillent en région, comme l’Abitibi, le Bas Saint-Laurent, la Gaspésie, le Saguenay-Lac-Saint-Jean et les Îles-de-la-Madeleine. Les jeunes qui souhaitent retourner travailler dans leur région natale après leurs études en ville ont le goût d’échanger avec des mentors de leur région.»
Academos, poursuit sa fondatrice, ne veut pas seulement aider les jeunes à faire des choix de carrière en accord avec leurs aspirations personnelles. «J’aimerais qu’ils comprennent l’importance de se bâtir un réseau professionnel à partir des contacts qu’ils auront eus avec nos mentors, dit-elle. Lorsqu’ils quittent Academos, je leur conseille de se mettre sur LinkedIn!»
La plateforme Enio pour les adolescents
À l’automne 2017, en collaboration avec Septembre Éditeur, Academos a lancé Enio, une plateforme d’orientation entièrement numérique qui propose aux élèves du deuxième cycle du secondaire une démarche personnalisée et interactive afin de les éclairer dans leur choix de carrière. «Pas moins de 16 activités sont réunies sur la plateforme pour permettre aux jeunes d’apprendre à se connaître et d’en savoir plus sur les programmes d’études et les professions, explique Catherine Légaré. Il s’agit d’un outil conçu pour aider les professionnels en orientation qui travaillent dans les écoles, car leur ratio est de 1 pour 1500 élèves.» Enio étant connectée avec Academos, les élèves peuvent recevoir des suggestions de mentors dans les domaines qui les intéressent. En 2018, environ 8000 élèves ont utilisé Enio dans le cadre scolaire.
La plateforme Élo pour les travailleurs
Les travailleurs ne sont pas en reste: en collaboration avec la directrice générale d’Academos, Lyne Maurier (B.A.A. gestion et intervention touristique, 1994), Catherine Légaré a créé à l’automne 2018 Élo, une plateforme de mentorat virtuel et professionnel, dont l’UQAM est l’un des partenaires bâtisseurs, qui permet à ses utilisateurs de devenir mentors ou mentorés ou les deux. «L’application Élo permet aux organisations d’offrir à leurs membres une formule de mentorat où le partage des expertises est encouragé, explique-t-elle. Les professionnels n’ont qu’à soumettre leur profil; l’application leur propose ensuite des jumelages avec d’autres professionnels en fonction de leurs intérêts (l’accès à la plateforme est offert gratuitement aux diplômés de l’UQAM). Ils peuvent ainsi entrer en contact avec d’autres personnes inspirantes afin d’accélérer leur développement de carrière, de gagner en autonomie dans leurs responsabilités et d’augmenter leur sentiment de compétence au travail.» Une traduction en anglais est prévue l’automne prochain afin d’offrir la plateforme dans le reste du Canada et aux États-Unis.
Dans le contexte démographique québécois, les organisations font face à des défis en matière de rétention de personnel et d’implication au travail. «Les formations traditionnelles, ou même les 5 à 7 festifs pour renforcer les liens entre les employés, ont atteint leurs limites. Les travailleurs ont soif d’authenticité et c’est ce que le mentorat leur apporte: un accompagnement personnalisé avec une personne de confiance», conclut Catherine Légaré.
Soirée Trajectoires 2019
La soirée Trajectoires 2019 aura lieu le 6 juin au Centre de création des 7 Doigts de la main. En ce 50e anniversaire de l’UQAM, cette édition spéciale se tiendra sous la présidence d’honneur de Jacques Primeau (B.A. communication, 1984), producteur, agent d’artistes et président des Productions Jacques K. Primeau, lui-même lauréat d’un prix Reconnaissance en 2009. Les billets pour assister à cet événement de célébration et de réseautage sont en vente au coût de 195 $.