Voir plus
Voir moins

Pénurie en enseignement: vers des solutions concrètes

L’UQAM obtient 1,5 M $ pour la création du Centre de services de formation pour les milieux.

Par Pierre-Etienne Caza

18 octobre 2019 à 13 h 10

Mis à jour le 22 octobre 2019 à 15 h 10

Photo: Getty Images

Les réflexions sur les meilleurs moyens à mettre en œuvre afin de pallier la pénurie de personnel enseignant au primaire sur l’île de Montréal passent à une vitesse supérieure: la Faculté des sciences de l’éducation a obtenu un peu plus de 1,5 million de dollars du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur afin de créer le Centre de services de formation pour les milieux (CSFM). «Multiforme et évolutif, le CSFM travaillera conjointement avec les commissions scolaires afin d’identifier les besoins de formations qualifiantes pour le personnel qui ne détient pas de brevet, et de formation continue du personnel qualifié, annonce Henri Boudreault, vice-doyen aux études à la Faculté des sciences de l’éducation. L’objectif est de concevoir des formations sur mesure tout en valorisant les expériences antérieures.»

Le comité de coordination du nouveau CSFM tiendra une rencontre dans les prochains jours afin d’amorcer ses travaux, qui se déclineront d’ici décembre 2020 autour de trois thématiques: la formation qualifiante pour le personnel déjà en exercice qui ne détient pas de brevet, la formation continue du personnel qualifié et des membres du corps professoral à l’université, et le dispositif de reconnaissance des acquis. Trois groupes de travail seront ainsi formés, chacun composé de professeurs et de professionnels de la Faculté des sciences de l’éducation et de représentants du milieu scolaire. «Tous ces groupes auront à se prononcer sur des contenus de formation et à intégrer dans leurs réflexions la question des modalités – présence, à distance, hybride, synchrone, asynchrone – et celle des dispositifs qui seront nécessaires pour rendre ces modalités fonctionnelles», précise le vice-doyen.

Diagnostic

«Dans le cadre de la pénurie qui sévit actuellement et des seuils critiques qui ont été atteints ces derniers mois, le réseau de l’éducation est présentement aux prises avec un besoin pressant de rehaussement des qualifications et de soutien à l’amélioration des compétences du personnel enseignant», rappelle Henri Boudreault. Au cours de la dernière année, les responsables de la Faculté des sciences de l’éducation ont rencontré à trois reprises les commissions scolaires francophones de l’île de Montréal (CSDM, CSMB, CSPI) afin de trouver des pistes de solution. «L’an dernier, ces trois commissions scolaires ont embauché plus de 650 personnes qui ne détenaient pas les autorisations requises», précise le vice-doyen.

Un premier cours offert

Après avoir pris acte de l’ampleur du problème, la Faculté des sciences de l’éducation a créé un cours en collaboration avec la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal. Le cours de 45 heures, Introduction à la profession enseignante et à la didactique générale, a été offert pour la première fois en août dernier le jour, le soir et les fins de semaine. Il est à nouveau offert cet automne. «La réponse des milieux a été très positive, souligne Henri Boudreault. Nous avons reçu à ce jour plus de 100 demandes d’information dont la moitié se sont traduites en nouvelles demandes d’inscription.»

Près de 60 % de la cohorte étudiante admise à ce nouveau cours détient une formation antérieure de premier, deuxième et même troisième cycle dans une discipline du Programme de formation de l’école québécoise – en langues, en sciences humaines, en sciences ou en littérature. Près de 25 % possède une formation connexe au domaine de l’éducation comme l’animation culturelle, le développement de carrière, la psychopédagogie, la sociologie, le travail social ou la psychologie. «Il s’agit maintenant de déterminer quelle sera la filière qualifiante pour tous ces profils, et pour tous les autres membres du personnel enseignant qui voudront s’inscrire à l’UQAM afin d’obtenir une autorisation légale d’enseigner», note le vice-doyen.

Formation qualifiante et formation continue

Le premier groupe de travail du CSFM se penchera donc sur la mise en œuvre rapide d’une formation initiale qualifiante pour le personnel qui ne détient pas de brevet d’enseignement au primaire, en adaptation scolaire et en classe d’accueil. «Tous les scénarios sont sur la table, de la maîtrise qualifiante à l’assouplissement du régime d’études pour le baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement primaire, souligne Henri Boudreault. Ce sera aux spécialistes de ce groupe de travail de proposer la ou les meilleures solutions.»

Le deuxième groupe de travail abordera la formation continue du personnel qualifié. «Dans son projet de Loi 40 modifiant principalement la Loi sur l’instruction publique relativement à l’organisation et à la gouvernance scolaires, le gouvernement Legault compte rendre obligatoire la formation continue des titulaires d’une autorisation d’enseigner, souligne Henri Boudreault. D’où la nécessité de déterminer avec le milieu scolaire la nature des besoins distincts de formation continue. Les formations proposées au personnel en exercice seront reconnues par des crédits, et devraient pouvoir être reconnues dans les tâches d’enseignement.»

Ce groupe de travail devra également réfléchir à la formation du corps enseignant à l’université qui offrira les cours de mise à jour.

«Pour la formation qualifiante comme pour la formation continue, il sera impératif de tenir compte de la conciliation travail-études, insiste Henri Boudreault. Il faut envisager des activités de formation créditées le soir, la fin de semaine ou durant la période estivale, et des activités dont le contenu, la durée et les finalités seraient modulables selon le besoin, permettant notamment un aller-retour entre la formation et la pratique.»

Un modèle de reconnaissance des acquis

Un troisième groupe de travail se penchera sur la reconnaissance des acquis, en collaboration avec des constituantes du réseau de l’Université du Québec, dont l’UQAC, l’UQAR, l’UQO et l’UQTR. «Le modèle développé aura pour objectif d’organiser la reconnaissance des expériences des personnes issues d’horizons divers afin d’accélérer l’accès à la profession enseignante, explique Henri Boudreault. Les expériences pertinentes pour l’enseignement doivent pouvoir être reconnues, et les compétences en enseignement doivent pouvoir être associées à ces expériences reconnues.»

Le CSFM compte s’appuyer sur la solide expertise développée depuis 20 ans dans le cadre du baccalauréat en formation professionnelle et technique, qui comporte jusqu’à 30 crédits de reconnaissance d’acquis disciplinaires.

Un travail collaboratif

Les premières propositions de travail des trois groupes sont attendues pour le mois de décembre prochain et les travaux du CSFM se poursuivront jusqu’en décembre 2020. «Ensuite, il s’agira d’assurer la pérennité du centre», note Henri Boudreault, qui se réjouit de fédérer autant de spécialistes pour ce projet nécessaire et emballant. «La collaboration de notre corps professoral, de notre équipe professionnelle et des membres du milieu scolaire est essentielle pour offrir des formations de qualité qui répondront aux besoins des milieux d’enseignement», conclut-il.