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Un robot à la Galerie

L’artiste mexicain Gilberto Esparza fabrique de l’énergie à partir des eaux usées de Montréal.

Par Marie-Claude Bourdon

6 juin 2017 à 15 h 06

Mis à jour le 6 juin 2017 à 15 h 06

Des bruits étranges accueillent ces jours-ci le visiteur à la Galerie de l’UQAM. Dans la pénombre, une machine s’active, transformant les contaminants présents dans les eaux usées de Montréal en une énergie alternative qui alimente un écosystème aquatique. Au centre de la machine, une sphère transparente laisse voir les plantes qui se maintiennent en vie grâce aux rafales d’énergie lumineuse produites par les bactéries des égouts montréalais. Des petits poissons nagent au travers de la végétation.

Plantas autofotosintéticas est la première exposition solo au Canada de l’artiste mexicain Gilberto Esparza. À l’intersection entre l’art, la science et les nouvelles technologies, cette machine qui semble sortie d’un film de science-fiction a pour but, comme toutes les œuvres de l’artiste, de faire réfléchir à l’impact de l’activité humaine sur la nature. Créée avec la complicité d’ingénieurs, de biologistes et de roboticiens, à la fois fonctionnelle et utopique, elle transforme vraiment les rejets évacués dans divers secteurs des égouts montréalais en une énergie qui permet la vie.

Depuis 2013, l’œuvre a été expérimentée à Lima, à Mexico, à Linz, à Ljubljana et à Athènes. À Montréal, l’artiste a identifié, avec la complicité du Service de l’environnement et du Service de l’eau de la Ville, des rejets provenant de différents quartiers à forte et faible densité de population, de zones commerciales ou industrielles, et même de l’UQAM. Sur le tableau lumineux du centre d’opération, avec ses boutons et cadrans aux allures rétro, on peut observer l’intensité d’énergie produite en fonction du degré de contamination de l’eau recueillie. Un clin d’œil original de la Galerie pour souligner le 375e anniversaire de Montréal.

Dans une des petites salles adjacentes, un film extrait du projet Plantas nómadas (2008-2013) montre un autre robot créé par l’artiste. Cet appareil biologique autonome, genre de R2-D2 aquatique à chevelure végétale, se promène le long du rio Lerma et du rio Santiago, deux cours d’eau très pollués du Mexique. Conçu comme un organisme, lui aussi recycle les contaminants et les nutriments présents dans l’eau en les transformant en énergie électrique, en oxygène et en eau propre, ce qui lui permet de se déplacer dans son environnement et de nourrir les plantes posées sur son dos. Le modus operandi de Plantas nómadas a inspiré celui de Plantas autofotosintéticas.

Né en 1975 à Aguascalientes («eaux chaudes», ça ne s’invente pas), au nord-ouest de Mexico, Gilberto Esparza a étudié les arts plastiques à l’Université de Guanajuato et les beaux-arts à Valence, en Espagne. Cet artiste qui s’inspire de l’écosystème urbain, du recyclage et des technologies a participé à plus de 70 expositions collectives à travers le monde. Il a aussi monté  une douzaine d’expositions individuelles au Mexique, en Espagne, en Slovénie et au Pérou.

Les deux commissaires de l’exposition sont Nuria Carton de Grammont (M.A. études des arts, 07), chargée de cours à l’Université Concordia spécialisée en art contemporain latino-américain, et Véronique Leblanc (M.A. études des arts, 10), chargée de cours au Département d’histoire de l’art, qui s’intéresse aux liens entre art, éthique et politique. C’est dans le cadre d’une résidence de recherches pour commissaires à Mexico qu’elle a eu l’idée de ce projet d’exposition avec Gilberto Esparza.

Deux visites commentées par les commissaires sont organisées le 10 juin (en français) et le 17 juin (en espagnol), à 13h30.

Objet de recherche

En parallèle, la Galerie de l’UQAM présente Objet de recherche, une exposition du finissant à la maîtrise en arts visuels et médiatiques Charles-Antoine Blais Métivier. L’installation au cœur de cette exposition nous confronte à l’omniprésence des interfaces tactiles et à la transformation de notre rapport à l’information entraînée par la numérisation des contenus. Par le biais de faux téléphones cellulaires que les visiteurs sont invités à manipuler, l’artiste fait réfléchir aux mécanismes par lesquels ces appareils influent désormais sur nos modes de perceptions et notre imaginaire.

Il faut faire vite pour voir ces deux expositions, qui se terminent le 17 juin.