Série «Titres d’ici»
Dialogue et pluralisme
Les essais qui composent l’ouvrage collectif intitulé Les conditions du dialogue au Québec, publié sous la direction du professeur du Département de science politique Alain-G. Gagnon et du doctorant en science politique Charles St-Louis, font le point sur les valeurs devant guider la cohabitation dans les espaces publics au Québec. Ils entendent non seulement identifier des défis à relever, mais aussi éclairer les avenues favorisant l’approfondissement d’un dialogue riche et porteur pour tous les citoyens. «Caractérisés depuis le milieu des années 1960 par la quête de politiques plus équitables et par la concertation des différents intervenants, le régime de citoyenneté québécois et ses modes de délibération sont aujourd’hui mis à mal», soutiennent le professeur et le doctorant. De plus, l’esprit d’échange, de conciliation et de réciprocité qui a fait la force de l’approche québécoise dans le domaine des relations interculturelles semble s’affaiblir, à un point tel que le gouvernement du Québec hésite encore à adopter l’interculturalisme comme projet rassembleur, soulignent les deux auteurs. Issues, notamment, des études politiques, de la philosophie, de l’histoire et du droit, les différentes perspectives réunies dans l’ouvrage visent à alimenter la réflexion sur la démocratisation des échanges publics et sur la cohabitation dans une société plurielle. Paru chez Québec Amérique.
Penser l’éducation
Essais, portraits, chroniques, convictions, espérances… Les textes du philosophe Normand Baillargeon réunis dans son ouvrage Propos sur l’éducation ont pour objet de discuter la place de la philosophie de l’éducation et de la formation des maîtres dans les universités. «Ils développent une perspective normative pour la gratuité de l’enseignement universitaire, militent pour l’apprentissage de la pensée critique et soulignent les raisons pour lesquelles celle-ci est si difficile à faire acquérir», écrit le professeur retraité du Département des sciences de l’éducation dans l’introduction. L’auteur défend, entre autres, les convictions suivantes: la recherche solide et pertinente en éducation est essentielle; la formation des maîtres est l’une des clés de toute réussite en éducation; toute réforme à grande échelle doit non seulement être fondée sur des données probantes, mais aussi être testée à petite échelle avant d’être implantée. Normand Baillargeon plaide enfin pour que les facultés de sciences de l’éducation forment des maîtres hautement cultivés, au fait de la recherche scientifique et, pour ce qui est du secondaire, possédant une solide formation disciplinaire acquise à l’université dans les domaines pertinents. Selon lui, ces facultés doivent «renoncer à ce clientélisme qu’elles pratiquent sans retenue et devenir de véritables filières d’élite.» Paru chez M éditeur.
Un grand premier ministre
L’ancien recteur Claude Corbo a fait paraître coup sur coup deux ouvrages portant sur Honoré Mercier (1840-1894), premier ministre du Québec de 1887 à 1891. Dans Honoré Mercier: discours 1873-1893, il a rassemblé une cinquantaine de discours de l’homme politique, grand réformiste et habile stratège. Farouche défenseur de l’autonomie du Québec, Honoré Mercier se dressait contre la volonté de centralisation du gouvernement fédéral et dénonçait les agressions contre les droits scolaires et linguistiques des minorités canadiennes-françaises. Personnage flamboyant, il fut chassé du pouvoir après une grande victoire électorale en 1890. Les magouilles de son entourage, qu’il contrôlait mal, et une faillite personnelle imputable à un style de vie de grand seigneur ont permis à ses adversaires de le renverser. «Il peut néanmoins être tenu pour l’un des grands premiers ministres que le Québec a connus», note l’auteur, qui a également fait paraître Honoré Mercier par lui-même, une fiction historique qui prend la forme d’un monologue de l’ancien premier ministre, si ce dernier avait pu écrire ses mémoires comme il en avait l’intention. «Mercier veut faire un ultime geste politique en racontant sa vie politique et en cherchant à s’assurer que les historiens ne puissent écrire ni sa biographie ni l’histoire de son temps sans avoir à prendre en compte son propre témoignage», explique l’auteur. Les deux ouvrages ont été publiés chez Del Busso.
Les statues de plâtre
«L’avenir des églises catholiques du Québec est gravement menacé, et le sort des objets mobiliers à caractère religieux qu’elles abritent est plus qu’incertain. Dans le contexte actuel de fermeture des églises, ces objets sont en effet retirés de leur lieu d’origine, déplacés, entreposés, vendus ou simplement détruits», affirme la doctorante en histoire de l’art Édith Prégent dans Préservation des objets religieux. La statuaire religieuse en plâtre du Québec. Longtemps considérées comme des objets de second ordre, compte tenu de leur nombre élevé et de leur fabrication en série, les statues de plâtre sont omniprésentes dans les églises et les chapelles depuis plus d’un siècle. Selon l’auteure, membre de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain, ce corpus d’objets comporte des valeurs artistiques et historiques qui lui confèrent un intérêt patrimonial. C’est dans cette perspective qu’elle préconise leur mise en valeur et leur préservation comme témoins matériels de l’histoire socioreligieuse du Québec. Divisé en trois chapitres, l’ouvrage s’attarde d’abord à démontrer l’omniprésence des statues de plâtre, ainsi que leur origine, leur nature et leur place dans l’histoire de l’art du Québec, puis à évaluer leur valeur patrimoniale et leur valeur muséale. Publié aux Presses de l’Université du Québec.
Révolution des mœurs
Dans La Révolution des mœurs. Comment les baby-boomers ont changé le Québec, le professeur émérite Jean-Marc Piotte, du Département de science politique, s’intéresse à ce mouvement social international, marqué par une grande soif de liberté et une remise en question des valeurs traditionnelles et de l’autorité, qui se différencie sur plusieurs points de la Révolution tranquille, un phénomène essentiellement québécois. La révolution des mœurs est le fait des baby-boomers, dont la composante féministe joue un rôle déterminant, «tandis que la Révolution tranquille est animée principalement par des acteurs provenant des mouvements de l’Action catholique à partir et au cours de la Seconde Guerre mondiale», écrit-il en introduction. L’auteur examine les transformations de la société québécoise au moyen de trois revues phares de l’époque: Parti pris (dont Piotte a été l’un des fondateurs) dans les années 60; Mainmise, dans les années 70; et La Vie en rose, un magazine féministe des années 80. Les baby-boomers ont légué aux jeunes une société aujourd’hui ancrée dans les droits de l’individu. Un Québec où l’on peut jouir d’une très grande liberté, certes, mais dans lequel on peut parfois manquer de la sécurité affective qu’apportaient les institutions traditionnelles comme la famille. «Les jeunes ont donc hérité d’un monde libre et inquiétant.» Publié chez Québec Amérique.
Masques africains et culture québécoise
L’ouvrage Masques africains et culture québécoise. La collection Ernest Gagnon (1945-1975) de Renée Legris, professeure associée au Département d’études littéraires, et de Pierre Pagé, qui a été professeur associé à la Faculté de communication, se penche sur la démarche de recherche particulière d’Ernest Gagnon. Professeur de lettres et de création littéraire à l’Université de Montréal pendant près de 30 ans, ce prêtre jésuite était collectionneur d’art africain traditionnel, de pièces océaniennes et de sculptures précolombiennes. D’abord spécialiste de l’art contemporain à l’École des Beaux-arts de Montréal, le philosophe puisait dans ses 10 années d’enseignement d’histoire de l’art pour guider les chercheurs québécois vers une pensée ethnologique affirmant la fonction structurelle des masques africains dans leurs propre société. «Son but n’était pas de devenir un expert de l’histoire d’un ou de plusieurs pays africains; il […] cherchait plutôt les voies d’une réflexion anthropologique offerte aux intellectuels québécois, sur la base d’une immense documentation internationale», écrivent les auteurs, d’anciens étudiants et collaborateurs-chercheurs du père Gagnon. Ces derniers commentent plusieurs pièces maîtresses de la vaste collection d’Ernest Gagnon, laquelle se trouve désormais au Musée des beaux-arts de Montréal ainsi qu’aux archives des Jésuites. Publié aux éditions Fides.