Série «Sur le terrain»
Des diplômés de l’UQAM qui ont fait leurs preuves répondent à 10 questions sur leur univers professionnel.
Délégué aux Affaires francophones et multilatérales du Québec à Paris, Ian Morissette (B.A science politique, 00; M.A. science politique, 03) a pour mandat de représenter le gouvernement du Québec auprès de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), qui regroupe 80 États et gouvernements.
Détenteur d’une maîtrise en relations internationales, il a fait ses premiers pas dans le domaine à la Chaire UNESCO-Bell en communication et développement international. Il a ensuite tâté du journalisme à la radio de Radio-Canada avant de se joindre, en 2004, au ministère des Relations internationales du Québec, où il a occupé différents postes, notamment celui de conseiller aux affaires nationales américaines. En 2009, il obtient sa première affectation à l’étranger, à la Délégation générale du Québec à Londres, à titre de directeur des Affaires politiques et publiques. Il est en poste à Paris depuis juillet 2013.
Quelle est la plus grande qualité pour être heureux dans votre domaine?
Il existe plusieurs qualités pour être heureux dans mon domaine, mais il faut d’abord et avant tout être fier du pays et du gouvernement que l’on représente, et fier de ce que l’on promeut. Il faut savoir faire preuve d’une grande humilité et aussi aimer aller à la rencontre des gens tout en étant ouvert d’esprit et à l’écoute.
Votre plus grande réussite?
La diplomatie est l’art d’influencer et de convaincre tout en faisant preuve de compromis. À cet égard, la réussite est toujours le résultat d’un travail collectif entre deux ou plusieurs partenaires. Le mérite n’est pas individuel. Voilà pourquoi je dirais que je suis particulièrement fier de la contribution du Québec à la Francophonie au cours des dernières années et plus précisément au rôle que nous avons joué dans l’adoption de la nouvelle stratégie économique pour la Francophonie, élaborée avec nos partenaires dans le cadre du Sommet de Dakar, en 2014.
Un faux pas qui vous a servi de leçon?
J’essaie de tirer des enseignements des faux pas comme des bons coups! Vous savez, les choses se passent rarement comme on l’avait prévu, mais en étant à l’écoute, ouvert et proactif, on réussit plus souvent qu’autrement à transformer un faux pas en opportunité.
Un bon coup d’un compétiteur que vous auriez aimé faire?
Certains pays comme la Suisse ou les pays scandinaves se sont positionnés très avantageusement au cours des dernières années en matière d’image de marque projetée à l’internationale – ce que les anglophones appellent le nation branding. Ils ont mené des campagnes de diplomatie très créatives et innovantes, ce qui leur a permis d’être plus influents sur la scène internationale. Le Québec a son lot de créateurs et nous pourrions nous en inspirer.
La dernière tendance dans votre secteur?
Les technologies de l’information et des communications ont transformé le métier de diplomate au cours de la dernière décennie, et ce, à plusieurs niveaux. Les médias sociaux sont devenus des outils d’influence incontournables; on parle même désormais de diplomatie numérique. Ces outils, comme Twitter, nous permettent de rejoindre des publics que l’on ne rejoignait pas auparavant.
Les diplomates étaient considérés comme les yeux et les oreilles de leur gouvernement dans le pays où ils étaient affectés. Avec les TIC, la façon de rapporter l’information s’est modifiée en profondeur. Nous devons aller chercher des informations complémentaires, qui ne se retrouvent pas sur les réseaux sociaux ou dans les médias.
Et ce qui est définitivement dépassé?
D’aucuns pourraient penser que les moyens de communication actuels ont rendu certains aspects de notre métier dépassés, mais je crois, au contraire, qu’ils les ont rendu encore plus nécessaires. Par exemple, même si l’on peut s’informer de ce qui se passe dans le monde entier en temps réel 24 heures sur 24, il demeure primordial d’avoir des yeux et des oreilles sur le terrain pour prendre le pouls et identifier les occasions. Il faut pouvoir compter sur un messager qui pourra nous représenter et promouvoir nos intérêts lors de rencontres «physiques», indispensables pour tisser les relations de confiance qui sont à la base de tout partenariat fructueux.
Sur la scène nationale ou internationale, qui est le «gourou» de l’heure?
Tom Fletcher, un ancien ambassadeur du Royaume-Uni au Liban, devenu aujourd’hui professeur, a beaucoup fait parler de lui au cours des dernières années. Il a amené à un autre niveau l’utilisation des médias sociaux dans l’univers de la diplomatie. Sur Twitter, il utilisait un langage d’une franchise à laquelle on ne s’attendait pas. C’était audacieux et inspirant!
Nommez une étoile montante qui vous inspire.
Il y en a plusieurs! J’ai la chance de travailler avec des gens extraordinaires provenant de 80 pays, sur les cinq continents, tous animés par le même désir de coopération et de solidarité. J’ai aussi beaucoup d’admiration pour les jeunes qui s’impliquent en politique, que ce soit chez nous ou ailleurs, dans les pays où le respect des droits de la personne et la démocratie sont encore loin d’être acquis mais qui, malgré les difficultés, voire les dangers, veulent changer les choses avec une détermination qui ne peut que susciter l’admiration.
Quel est le livre qu’il faut lire en ce moment?
Plutôt qu’un livre, Je crois que le site Web du think tank International Crisis Group est un incontournable en ce moment afin de bien saisir la dynamique de certains conflits sur la planète. Ce groupe produit des analyses détaillées et propose même des solutions pour régler ces conflits. C’est une référence dans le domaine.
Les deux principaux conseils que vous donneriez à un jeune qui commence sa carrière?
Il faut être ouvert d’esprit et avoir le goût de l’aventure!