
Au tournant du 20e siècle, de grandes expositions agricoles se tenaient à Montréal. Avec ces événements, disparus au fil du temps, s’est perdu un lien entre villes et campagnes. Depuis, l’écart va grandissant entre le monde rural et celui de la ville. C’est en entendant cette réflexion du président de l’Union des producteurs agricoles (UPA), Marcel Groleau, que Monique Régimbald-Zeiber, professeure associée à l’École des arts visuels et médiatiques, a eu l’idée d’une Exposition agriculturelle. Ce projet sera lancé avec le colloque Entre campagnes et villes – cultures cherchent cultures: vers la conception d’un espace destiné au partage des connaissances et des expériences agriculturelles, qui se tiendra les 11 et 12 mai dans le cadre du Congrès de l’Acfas.
«Les grands enjeux autour de l’agriculture – l’appropriation des terres, la gestion de l’eau, l’alimentation – me préoccupaient déjà, dit la professeure. Et quand Marcel Groleau a parlé d’expositions, c’est venu me chercher. L’agriculture, ce n’est pas mon domaine, mais les expositions, je connais bien.» Comment faire pour rapprocher les citoyens et le monde rural? C’est ainsi que s’est formé le projet d’organiser une grande exposition sur ce thème à Montréal. «Il ne s’agit pas de refaire une exposition agricole avec des animaux et de la machinerie, comme à l’époque, dit Monique Régimbald-Zeiber, mais d’inventer quelque chose de nouveau.» Ce projet, conçu en collaboration avec Luc-Alain Giraldeau, doyen de la Faculté des sciences, a reçu l’appui de l’UQAM, des Fonds de recherche du Québec, de l’Union des production agricoles et d’Espace pour la vie. Il figure parmi les 180 projets retenus lors de l’événement «Je vois Montréal», tenu à l’automne 2014 en vue du 375e anniversaire de la métropole.
Le colloque a pour objectif de pousser plus loin la réflexion sur le nécessaire rapprochement entre la réalité urbaine et celle de la campagne. Coresponsable de l’événement avec Denise Pérusse, du Fonds québécois de recherche – Société et culture (FQRSC), Monique Régimbald-Zeiber souhaite favoriser la rencontre entre des experts et des praticiens de différents domaines qui ont pour point de convergence les enjeux concernant l’agriculture.
On pourra y voir un artiste comme le professeur de l’École des arts visuels et médiatiques Michel Boulanger, qui travaille depuis plusieurs années sur un projet de Ferme modèle, dans lequel il s’intéresse à la place qu’occupe l’image de la ferme dans l’imaginaire collectif. Il y aura des présentations sur des thèmes comme la permaculture, une nouvelle façon de pratiquer l’agriculture inspirée de la notion d’écosystème, la biodiversité des espèces cultivées, la gestion des territoires agricoles, l’acceptabilité sociale de l’agriculture et la sécurité alimentaire. La transdisciplinarité, l’intersectorialité et la valorisation des résultats de recherche seront à l’honneur tout au long des deux jours du colloque.
« Si ceux qui pensent que les OGM sont une catastrophe rencontrent ceux qui disent le contraire et que cette rencontre se fait en présence de l’art, je pense que cela peut rendre toutes sortes de choses possibles. »
Monique régimbald-zeiber,
professeure associée à l’École des arts visuels et médiatiques
D’autres Uqamiens participeront à l’événement: Gisèle Trudel et Anne-Marie Ninacs, professeures à l’École des arts visuels et médiatiques, Patrick Evans, professeur à l’École de design, Éric Duchemin, professeur associé à l’Institut des sciences de l’environnement, ainsi que le doyen Luc-Alain Giraldeau, qui prononcera notamment le mot de bienvenue. Parmi les autres personnalités présentes, Rémi Quirion, le scientifique en chef du Québec, s’entretiendra avec Fadila Laanan, secrétaire d’État à la recherche scientifique de la Région de Bruxelles-Capitale sur des questions autour de l’agriculture et de l’alimentation durable. Louise Poissant, directrice scientifique du FQRSC et ex-doyenne de la Faculté des arts, sera présente pour présider la première séance du colloque. Marcel Groleau, président de l’UPA, fera une présentation, et l’animatrice Catherine Mercier, de l’émission La semaine verte, à Radio-Canada, se joindra à un panel.
Joliment intitulées – «Mettre la table», «Sur quoi tabler: écologie et technologies», «Passer sous la table: les groupes fragilisés», «Passer à table: alimentation» –, les sections du colloque seront entrecoupées de panels consacrés aux questions des «commensaux», gens de la terre, du milieu scientifique, éthique et culturel. Le défi, souligne Monique Régimbald-Zeiber, c’est d’abord de réunir des gens de différentes disciplines et de provoquer les échanges. «Si ceux qui pensent que les OGM sont une catastrophe rencontrent ceux qui disent le contraire et que cette rencontre se fait en présence de l’art, je pense que cela peut rendre toutes sortes de choses possibles», déclare-t-elle.
Le colloque aura lieu à la Galerie de l’UQAM, qui présentera pour l’occasion des dessins reliés au projet de Ferme modèle de Michel Boulanger. La vidéo Nous aimons la terre, produite à partir des œuvres de l’artiste, sera aussi projetée pendant toute la durée du congrès de l’Acfas sur la façade extérieure du pavillon de Design de l’UQAM.
Un volet agriculturel au Rendez-vous horticole du Jardin Botanique
Une autre exposition des œuvres de Michel Boulanger aura lieu lors du Rendez-vous horticole du Jardin botanique de Montréal (une des institutions d’Espace pour la vie), les 27, 28 et 29 mai. Trois dessins numériques grand format, Laiterie, Remisage hivernal et Salle de traite, seront installés sur le site, exposant les visiteurs à la complexité des équipements de l’industrie laitière contemporaine. Les œuvres seront présentées sur un parcours extérieur aménagé dans les jardins où les visiteurs seront invités à répondre à des questions sur l’agriculture. Le samedi 28 mai à 15 h, au Café-Terrasse de l’Insectarium, un café-rencontre traitera des enjeux entourant l’agriculture et l’alimentation. Sous le thème La vraie nature de l’agriculture, Michel Boulanger, Luc-Alain Giraldeau et Marcel Groleau débattront avec le public de ce qui est naturel dans l’agriculture et de ce qui la menace.
«Cette exposition, c’est un ballon d’essai que nous lançons en vue de la grande exposition agriculturelle prévue pour 2017, à l’occasion du 375e anniversaire de Montréal», mentionne Monique Régimbald-Zeiber, qui souhaiterait que l’événement devienne pérenne et qu’il rayonne à travers la province. «Je sème mes petites graines. On verra ce qui poussera», dit-elle avec son enthousiasme communicatif.