Voir plus
Voir moins

Une véritable mine d’or

Une vingtaine d’étudiants visitent les installations de la mine Éléonore dans la région de la Baie James.

Par Pierre-Etienne Caza

14 novembre 2016 à 8 h 11

Mis à jour le 14 novembre 2016 à 8 h 11

Christine Beausoleil, directrice de l’exploration de Goldcorp (à gauche) a accueilli la vingtaine d’étudiants de l’UQAM à la mine Éléonore.Photo: Normand Goulet

En septembre dernier, une vingtaine d’étudiants de la maîtrise en sciences de la Terre ont eu la chance de visiter la mine aurifère Éléonore, située au nord-est du réservoir Opinaca, dans la région de la Baie James. «C’était la première fois que la mine faisait visiter ses installations à des étudiants universitaires», souligne le professeur Normand Goulet, du Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère. Cette sortie s’inscrivait dans le cadre du cours Déformation des gîtes minéraux.

La mine Éléonore, ouverte depuis l’an dernier, appartient à Goldcorp, une société canadienne basée à Vancouver. La compagnie exploite quatre sites miniers au Canada, trois au Mexique et quatre autres en Amérique centrale et en Amérique du Sud. «Le professeur associé Michel Gauthier a participé à la découverte de ce gisement d’or il y a une vingtaine d’années, raconte Normand Goulet. La mine Éléonore est la première du Grand Nord québécois, dit-il, la seconde étant la mine de diamants Renard, qui vient d’être inaugurée.»

Christine Beausoleil (B. Sc. géologie, 97), directrice de l’exploration de Goldcorp, est une diplômée de l’UQAM. «Elle nous a invités à visiter les installations de la mine Éléonore, toutes dépenses payées», dit le professeur, expliquant que ce type de visite permet à l’entreprise de se faire connaître des étudiants dans le but d’assurer la relève de son contingent de travailleurs.

Une petite ville dans le Nord

Le plus frappant quand on débarque dans le Grand Nord, c’est de constater que Goldcorp a dû recréer une petite ville au milieu de nulle part, avec toutes les infrastructures nécessaires à la cohabitation des quelque 1 000 travailleurs de la mine, affirment de concert Lucas Crappeel et Tristan Guillois. Les deux étudiants, qui proviennent de l’Observatoire des Sciences de l’Univers en région Centre, rattaché à l’Université d’Orléans, en France, sont inscrits cet automne au cours du professeur Goulet.

Au cours des deux jours passés à la mine Éléonore, les étudiants de l’UQAM ont appris des choses sur les aspects géologiques de l’exploration minière, mais aussi sur les impératifs logistiques et sécuritaires d’une entreprise comme celle-là. «Nous avons été charmés par l’accueil chaleureux de l’équipe de Goldcorp et surtout soufflés par la transparence dont ont fait preuve leurs représentants», raconte Lucas Crappeel. «Ils ont répondu à toutes nos questions, y compris celles qui portaient sur le gisement, sur les techniques d’extraction, sur leurs investissements en infrastructure et sur ce qu’ils pensent en retirer à long terme», note pour sa part Tristan Guillois. «Ils ont même répondu à nos questions concernant leur salaire!», ajoute Lucas Crappeel.

De nouveaux modèles géologiques

Les visiteurs ont pu vivre une journée typique en se levant à 4 h 30 pour descendre dans la mine, à 1 kilomètre sous terre. «Nous avons vu comment la mine a été développée et comment est exploité le gisement», souligne Lucas Crappeel.

Il y a eu plusieurs périodes de déformation géologique sur ce territoire, explique Normand Goulet. Au gré des plis et des failles qui se sont créés, l’or s’est déplacé – on dit dans le jargon qu’il a été «plissé». «Jusqu’à maintenant, on n’exploitait pas les zones où l’or s’était disséminé à la suite de plusieurs déformations, car c’était trop complexe, mais les nouveaux schémas de minéralisation permettent de le faire, poursuit Tristan Guillois. À force d’exploration, on en est venu à changer les modèles géologiques.»

D’autres compagnies de plus petite taille surfent sur la vague de ces nouveaux modèles et se sont installées tout autour de la mine Éléonore, en mode exploration. «Si ces compagnies trouvent de l’or, celui-ci sera traité dans le moulin de la mine Éléonore, qui possède déjà les infrastructures adéquates», précise le professeur.

Les installations souterraines de Goldcorp ont impressionné les visiteurs. «Il y a des garages énormes avec des voûtes aussi hautes que dans une cathédrale, où l’on assemble des camions de 50 tonnes qui ont été descendus en pièces détachées», raconte Normand Goulet.

Tout y est informatisé, ont-ils observé. «Les décisions sont prises par des géologues et des ingénieurs à partir de modélisations 3D afin de bien cibler les veines où il est rentable de dynamiter», explique Tristan Guillois.

La quantité d’électricité demandée par une mine comme celle-là est telle qu’il y a des régulateurs pour tout, y compris la ventilation et la climatisation, souligne Tristan Guillois. «C’est vraiment impressionnant de voir passer ces énormes camions pendant que des gens mangent dans une cuisine souterraine sécurisée et que des foreurs sont au travail dans leur bulle de climatisation.» Leur bulle de climatisation? «La température augmente de dix degrés par kilomètre sous terre, alors il est nécessaire de climatiser l’environnement où les foreurs travaillent», explique Normand Goulet.

À la fin de la visite, les lumières ont été éteintes pendant quelque secondes, laissant les visiteurs expérimenter la véritable noirceur sous terre. «On ne voit même pas notre main devant notre visage!», affirme Tristan Guillois.

Un discours responsable

Sans surprise, les représentants de Goldcorp ont vanté leurs efforts en matière de responsabilité environnementale, de même que leurs initiatives auprès des autochtones de la région, qui appartiennent à la nation Crie de Wemindji. «Plusieurs autochtones travaillent à la mine, surtout dans les métiers de services», souligne Tristan Guillois. «Comme c’est la première mine en importance dans la région, Goldcorp veut soigner son image et avoir le minimum d’impact environnemental, ajoute Lucas Crappeel. Les dirigeants prévoient déjà la façon dont ils réhabiliteront les lieux dans 25 ans.»

Des sorties formatrices

La moitié des étudiants inscrits au cours de Norman Goulet provenait de France, où il n’y a plus aucune mine en activité, nous apprend Tristan Guillois. «Nous sommes chanceux de pouvoir venir ici parfaire notre formation, souligne-t-il. J’étais à peine débarqué de l’avion, l’été dernier, quand je me suis retrouvé en Abitibi pour une sortie de 10 jours!»

Normand Goulet, au centre, avec ses élèves dans une galerie de la mine LaRonde.Photo: Lucas Crappeel

C’est dans la mine LaRonde, située à mi-chemin entre Rouyn-Noranda et Val-d’Or, que Lucas Crappeel a vécu sa première expérience de descente dans une mine. «Pour nous qui voulons travailler dans ce domaine, c’est une occasion inestimable», renchérit-il. «La plus grande différence avec la France, c’est qu’ici, ce sont des dirigeants haut placés qui prennent le temps de nous accueillir sur le terrain, ce qui n’arrive jamais en France. Or, ce sont des contacts précieux pour une éventuelle recherche de stage ou même d’emploi», souligne Tristan Guillois.

Normand Goulet est fier des programmes de baccalauréat en sciences de la Terre et de l’atmosphère, concentration géologie, et de la maîtrise en sciences de la Terre offerts à l’UQAM. «Nous offrons un bel arrimage entre théorie et recherche, en plus de proposer plusieurs sorties sur le terrain. Nous formons de futurs géologues compétents, prêts à se tailler une place sur le marché du travail.»