Sept diplômés de l’UQAM seront honorés à l’occasion du Gala Reconnaissance 2015 pour leur cheminement exemplaire et leur engagement. Ce texte est le sixième d’une série de sept articles présentant les lauréats.
«Le journal L’Itinéraire, c’était mon bébé!», lance Serge Lareault, qui dirigeait, jusqu’en juillet 2014, le groupe communautaire mis sur pied pour aider à la réinsertion des personnes de la rue qui fabrique le journal. «Après avoir participé au développement de ce qui est devenu une véritable institution en matière de journal de rue, j’ai mis les deux dernières années à préparer ma relève et je suis très fier de la nouvelle équipe mise en place», poursuit l’ancien rédacteur en chef.
De retour d’un congé sabbatique dont il a profité pour faire le tour du monde, visitant notamment l’Asie et l’Amérique latine, Serge Lareault occupe depuis janvier 2015 le poste de consultant en développement international pour le Réseau international des journaux de rue/International Network of Street Papers (INSP), un organisme à but non lucratif qu’il connaît bien pour en avoir assumé la présidence pendant huit ans (2006-2014). «Je suis en charge d’un vaste projet de recherche visant à documenter les pratiques des journaux de rue du Réseau. Il s’agit de répertorier les modèles de structure organisationnelle, les contenus et les formats priorisés dans nos médias ainsi que les innovations et les programmes sociaux mis en place selon les cas tout en analysant les modèles qui fonctionnent et les éléments contribuant à leur succès.»
Un réseau mondial
Fondé en 1994, l’INSP, dont le siège social est situé à Glasgow, en Écosse, regroupe sous son aile près de 115 journaux de rue répartis dans 35 pays et publiés en 24 langues différentes, qui fournissent de l’emploi à quelque 14 000 camelots. Grâce à d’importants partenaires financiers comme l’Union européenne et les Nations unies, l’INSP offre de l’aide au développement et du soutien financier aux journaux de rue indépendants, des entreprises d’économie sociale ayant pour but d’augmenter l’autonomie et la réinsertion sur le marché du travail des personnes marginales et sans-abri. Sous la gouverne de Serge Lareault, l’INSP est devenu un leader reconnu mondialement en matière de lutte à la pauvreté dans les pays industrialisés et en développement. Pour le compte du Réseau, l’homme a aussi contribué au développement de projets de journaux de rue en Afrique du Sud et en Amérique latine et conçu de nombreuses campagnes de financement.
Le journal de rue du 21e siècle
Présents dans 600 villes du monde, les journaux de rue comme les autres imprimés ont été bouleversés par l’apparition d’Internet et des médias sociaux. «Il faut les aider à franchir le 21e siècle et les repositionner tout en s’assurant que leur virage technologique se fasse de la bonne manière», avance Serge Lareault. Le consultant ne manque pas d’idées. «On pourrait développer une application permettant aux lecteurs d’acheter leur exemplaire dans la rue avec une carte de crédit ou un téléphone intelligent sans avoir recours à de l’argent comptant», dit-il. Quant au passage à une plateforme de diffusion Web, «il faut voir ce qui fonctionne bien du côté des journaux et des magazines traditionnels pour s’en inspirer et voir si cela peut être adapté aux journaux de rue.»
Échelonné sur près de trois ans, le projet de recherche vise également à produire un guide téléchargeable sur le site Internet de l’INSP pour les entrepreneurs sociaux et les groupes communautaires tentés par l’expérience d’un journal de rue. «Nous ne cherchons pas à offrir un modèle d’affaires unique. Chaque organisme pourrait choisir sa formule en fonction de sa capacité et de sa vision.» Un service de consultation serait aussi offert par le Réseau afin d’aider au démarrage.
Réinventer le concept d’économie sociale
Ardent défenseur de l’économie sociale, Serge Lareault souhaite rédiger un livre présentant sa vision originale du concept. «Si je lançais un journal de rue aujourd’hui, je prendrais contact avec les grandes entreprises de presse pour leur demander de participer à notre mission sociale en leur proposant par exemple de partager leur savoir, leur équipement et leur expertise en matière de production d’un journal, dit-il. Cela permettrait de faire des économies sur les coûts de production et d’injecter plus d’argent dans les services d’insertion sociale, de formation socioprofessionnelle et d’intervention psychosociale.»