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Maîtres de la danse

Le Département de danse célèbre le 20e anniversaire de sa maîtrise.

Par Valérie Martin

22 avril 2014 à 13 h 04

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 19 h 09

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Dans les carnets | 2010. Chorégraphie et interprétation: Sarah Dell’Ava. Photo: Frédéric Chais

Le seul programme francophone de deuxième cycle en danse de l’Amérique du Nord, celui du Département de danse de l’UQAM, célèbre ses 20 ans cette année. «À l’époque de sa création, le contexte était très favorable au développement des études dans le domaine de la danse, rappelle Nicole Harbonnier-Topin, directrice du programme depuis 2009. La renommée de chorégraphes comme Jean-Pierre Perreault, Marie Chouinard et Édouard Lock attirait de nombreux danseurs à Montréal. Des organismes de diffusion comme l’Agora de la danse et Tangente se développaient et le Festival de nouvelle danse gagnait de plus en plus d’adeptes.»

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Nicole Harbonnier-Topin. Photo: Émilie Tournevache

Le programme de maîtrise possède une double orientation: il combine la pratique de la danse à la recherche. Après un cursus de cours théoriques et techniques, les étudiants choisissent entre le mémoire-recherche ou le mémoire-création. «C’est ce qui attire de nombreux Européens francophones puisque la majorité des programmes d’enseignement supérieur offerts là-bas sont plus théoriques», dit Nicole Harbonnier-Topin.

Le but des études de deuxième cycle vise à former des professionnels aptes à renouveler leur pratique et à assurer un rôle de leadership dans le développement de la danse au Québec. «Nous voulons former des praticiens plus réflexifs et aptes à mieux défendre leurs projets, leurs idées et leurs créations», soutient la directrice du programme. Selon les observations de celle qui est professeure en étude du mouvement au Département de danse depuis 2004, la plupart des étudiants qui s’inscrivent aux études de deuxième cycle sont déjà actifs dans le milieu de la danse. «Ils veulent réfléchir à leurs pratiques ou approfondir leurs créations. Faire une maîtrise correspond à un besoin de ressourcement personnel.»

Interprètes et chorégraphes de renom

Depuis la mise sur pied de la maîtrise, 82 étudiants ont obtenu leur diplôme. Plusieurs d’entre eux sont aujourd’hui reconnus en tant qu’interprètes ou chorégraphes, qu’on pense à Jane Mappin (2000), Chantal Lamirande (2003), Sylvain Lafortune (2003), Pamela Newell (2007), Catherine Gaudet (2012), Sarah Dell’Ava (2012) ou Caroline Gravel (2012). Des diplômés ont été embauchés par le Département de danse, dont la chargée de cours Hélène Blackburn (1996) et la professeure Manon Levac (2000). «Outres des interprètes, des chorégraphes et des universitaires, le programme de maîtrise a formé de nombreux enseignants dans les cégeps et les écoles secondaires ainsi que des professionnels œuvrant dans différentes structures de diffusion de la danse», remarque Nicole Harbonnier-Topin.

Afin d’accompagner les étudiants dans leur recherche-création, les professeurs de la maîtrise ont développé et adapté des approches méthodologiques propres à l’observation et à l’étude de la danse, dont une technique visant à décrire le plus précisément possible les actions et les gestes. «C’est une démarche contre-intuitive: il s’agit d’obtenir le quoi et le comment du geste et du mouvement. Lorsque je suis légère, qu’est-ce je fais? Je pousse par exemple plus fort sur le sol avec mon pied, et ainsi de suite. C’est un moyen de décrire de manière très fine le mouvement», observe Nicole Harbonnier-Topin.

La maîtrise en danse accorde également beaucoup d’importance au champ de l’éducation somatique. Celle-ci regroupe plusieurs approches corporelles comme la gymnastique holistique et permet d’augmenter l’aisance, la précision et l’efficacité du mouvement par le développement de la conscience corporelle, explique la professeure, elle-même formée en analyse fonctionnelle du corps, une approche française globale intégrée dans le champ de l’éducation somatique.

Du côté de la recherche-création, «on s’interroge beaucoup sur le rôle de l’interprète, en partie parce que la manière de voir la profession d’interprète a beaucoup évolué depuis quelques années, remarque Nicole Harbonnier-Topin. La profession s’est syndicalisée. Les interprètes sont aujourd’hui reconnus comme cocréateurs de l’œuvre, ils participent à la création. Ce ne sont plus de simples exécutants.»

Aujourd’hui professeure au Département de danse, Johanna Bienaise a entre autres réalisé un mémoire-création sur la présence scénique des danseurs, avant de poursuivre ses recherches sur le thème de l’adaptabilité du danseur dans le cadre de son doctorat en études et pratiques des arts. La diplômée Caroline Gravel s’est penchée pour sa part sur la reprise de rôle et sur la manière dont les interprètes se réapproprient la gestuelle d’un chorégraphe ou d’un autre danseur. «Ce sont des recherches qui sont près de la réalité des étudiants et pertinentes pour le métier d’interprète. Une spécificité propre au Québec, observe Nicole Harbonnier-Topin. En France comme en Europe de façon plus générale, les recherches portent davantage sur l’histoire ou l’esthétique de la danse.»

Les mémoires de recherche, qui comptent pour un peu plus de la moitié des mémoires déposés depuis les débuts du programme, ont abordé quant à eux plusieurs aspects de la danse comme la formation et l’enseignement, la santé, l’histoire et l’esthétique, la spiritualité, les danses anciennes et des thématiques davantage apparentées à la politique et à la sociologie, comme la place du danseur dans une société démocratique.

Activités de célébration

Plusieurs activités soulignant le 20e anniversaire du programme auront lieu les 25 et 26 avril prochains. Parmi celles-ci, on compte des ateliers d’improvisation et de pratique, une table ronde sur le philosophe Gilles Deleuze et son apport à la création et à l’étude de l’art, un colloque où l’on présentera les travaux de trois diplômées de la maîtrise, Marie Mougeolle, Johanna Bienaise ainsi qu’Helen Simard, auteure d’un mémoire de recherche sur le break dance et l’identité, dirigé par Nicole Harbonnier-Topin. Ce colloque sera l’occasion de discuter des méthodologies de recherche utilisées dans le cadre de la maîtrise, des besoins futurs de la recherche en danse et de l’intégration des danseurs dans le milieu professionnel.