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Sciences de l’environnement: une approche reconnue

Marc Lucotte remporte le prix Adrien-Pouliot de l’Acfas pour ses collaborations avec la France.

Par Valérie Martin

9 octobre 2013 à 13 h 10

Mis à jour le 7 juin 2022 à 12 h 15

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Marc Lucotte. Photo: Nathalie St-Pierre.

Marc Lucotte, professeur au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère et à l’Institut des sciences de l’environnement, a remporté le prix Adrien-Pouliot – Coopération scientifique avec la France. Décerné par l’Association francophone pour le savoir (Acfas), ce prix, créé en 2000 en hommage au mathématicien et ancien président de l’Association, souligne l’excellence de travaux réalisés en collaboration avec des chercheurs de la France et du Canada et dont les retombées sont profitables pour les deux pays. «Je mets de l’avant des projets qui ont une approche écosystémique, explique Marc Lucotte. Pour mieux comprendre les problématiques environnementales, il faut en dresser un portrait global en faisant appel aux savoirs de plusieurs sciences, dont les sciences biophysiques, l’ingénierie, les sciences humaines et les sciences de la santé, et impliquer dès le départ des chercheurs provenant de plusieurs disciplines.»

Chercheur au Centre de recherche en géochimie et géodynamique (GEOTOP) et directeur du doctorat en sciences de l’environnement, Marc Lucotte préconise les recherches-actions qui impliquent «non seulement des chercheurs de plusieurs disciplines, mais aussi les utilisateurs de la science, qu’ils soient membres du gouvernement, politologues, agriculteurs, fermiers ou citoyens. La recherche scientifique doit servir à améliorer l’environnement dans lequel nous vivons et mener à des actions concrètes.»

Son expertise dans le domaine des sciences de l’environnement ainsi que l’originalité et la particularité de son approche scientifique lui ont valu plusieurs distinctions, dont le prix Michel-Jurdant en sciences de l’environnement, en 2004, décerné par l’Acfas, et un doctorat honorifique de l’Université Paul Sabatier, de Toulouse, en France. En 2006, Marc Lucotte a été nommé membre du Conseil scientifique du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le principal organisme public de recherche à caractère pluridisciplinaire en France, qui regroupe environ 13 000 chercheurs. Son second mandat de quatre ans se terminera l’an prochain. «Je collabore avec des chercheurs français depuis une dizaine d’années», dit le chercheur qui a aussi été président du Conseil scientifique et technique de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA), un des acteurs majeurs de la recherche environnementale en France.

Le biogéochimiste participe actuellement au vaste projet de recherche SABRE (pour Salix en agriculture pour des bandes riveraines énergétiques) sur l’utilisation des pesticides et des engrais chimiques, comme le Roundup, un herbicide largement utilisé par les agriculteurs pour son efficacité, commercialisé par la multinationale agroalimentaire Monsanto. Le projet est en cours de réalisation sur trois continents, en France, au Québec et au Brésil. «Nous cherchons à évaluer à la fois la toxicité réelle des engrais chimiques et des pesticides ainsi que les perceptions des agriculteurs, des citoyens et des décideurs sur leur utilisation», dit le chercheur. L’utilisation de pesticides fait couler beaucoup d’encre: les environnementalistes, les agriculteurs et les fournisseurs de ces produits ont chacun leur point de vue sur la question et l’information est souvent biaisée en fonction de leurs intérêts, remarque le chercheur. «Ne plus avoir recours du tout aux pesticides n’est pas la meilleure solution pour les agriculteurs dans les conditions actuelles. Il faut plutôt chercher à employer les pesticides à bon escient, en arrosant les champs moins souvent et à des moments mieux ciblés durant la saison agricole, par exemple, et ce, afin de mieux protéger les sols et les cours d’eau et de produire des aliments plus nutritifs et moins traités aux pesticides.»

Après le projet CARUSO, qui avait pour but de mieux comprendre les effets du mercure sur la santé humaine tout en proposant aux populations riveraines du Brésil l’adoption de nouvelles habitudes alimentaires et de nouvelles pratiques de pêche et de foresterie afin de réduire leur exposition au mercure, Marc Lucotte poursuit ses recherches-actions sur la dégradation de l’environnement en lien avec l’altération de la santé des populations dans le cadre du projet PLUPH (Poor Land Use, Poor Health), dont il est le chercheur principal. Ce programme vise à sensibiliser les populations vulnérables aux pratiques agro-forestières durables. Le déboisement de la forêt tropicale humide en Amazonie brésilienne entraîne de nombreux problèmes, dont la transmission de la maladie de Chagas. «Les palmiers, qui poussent en abondance dans les zones de déforestation, abritent de dangereux insectes pour l’humain, des triatomines, vecteurs de la maladie de Chagas, explique Marc Lucotte. Plus il y a de palmiers et plus les colons et leurs familles ont de chances de développer la maladie, qui peut entraîner la mort, en raison d’une hypertrophie des organes. En proposant aux colons qui déboisent la forêt tropicale d’adopter de nouvelles pratiques d’usage de leurs terres (culture de noix, de fruits, etc.) pour faire vivre leur famille, par exemple, on peut mieux contrer la transmission de la maladie de Chagas.»