Depuis 2011, le Réseau entreprise et développement durable (REDD) aide plusieurs petites et moyennes entreprises à mettre en place de meilleures pratiques de gestion en développement durable. «Il n’y a pas que les grandes entreprises qui doivent adopter des façons de faire plus écologiques et éthiques, souligne la directrice du bureau francophone du REDD, la professeure Marie-France Turcotte, du Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale. Les PME jouent un rôle essentiel dans l’économie : elles contribuent chaque année à la création de plus de 80 % des emplois au Canada et produisent plus de la moitié des déchets commerciaux.»
Le Conseil des PME du REDD, formé de dirigeants de PME et de représentants du secteur public et d’organismes à but non lucratif reconnus pour leurs bonnes pratiques en matière de développement durable, s’est réuni, lors d’une table ronde en mars 2012, afin de définir les priorités des PME et les prochains défis auxquels elles ont à faire face. «Un rapport a été publié et présente une liste de sept questions qui illustrent les préoccupations des PME, dit la professeure. Nous voulons susciter la réflexion, échanger et apporter des pistes de solution.»
Les PME participantes proviennent de plusieurs secteurs : textile, sports, fabrication de produits d’entretien ménager, etc. «Que l’on parle des Alouettes de Montréal, de l’organisme à but non lucratif pour la préservation de la nature WWF ou du fabricant Bio-Vert, ces PME ont la particularité d’avoir déjà entamé un processus dans le but d’améliorer leurs performances sociales et environnementales, explique Marie-France Turcotte. Certaines pratiques ont changé, d’autres sont encore à améliorer.»
L’un des principaux défis pour les PME est d’informer et de convaincre leurs interlocuteurs (consommateurs, fournisseurs, clients, etc.) du bien-fondé de leurs actions tout en restant crédibles. «Les compagnies cherchent à se dissocier du greenwashing. Il y a beaucoup de méfiance : les consommateurs, par exemple, ont parfois de la difficulté à séparer le bon grain de l’ivraie», remarque Marie-France Turcotte. Les PME affirment également qu’elles manquent de connaissances en développement durable, en particulier lorsqu’il est question des nombreux outils (publicité, certification) mis à leur disposition pour devenir plus vertes ou pour promouvoir leurs efforts en ce sens. «Les PME sont parfois obligées d’obtenir des certifications dans le but de répondre aux exigences d’un distributeur ou pour satisfaire les demandes d’un groupe de pression. Afin de faire le meilleur choix, ces dernières doivent bien connaître les caractéristiques de ces certifications et leur validité. Cela impose des coûts importants et la plupart d’entre elles ont des budgets limités.»
Faire participer les employés
Pour mettre sur pied des initiatives de développement durable à l’interne, les dirigeants d’entreprise ont intérêt à impliquer les employés et à leur donner au besoin une formation en la matière. «Il suffit parfois de demander aux employés quels sont les meilleurs moyens pour faciliter leurs tâches, illustre la professeure. Les solutions sont souvent simples, mais il faut prendre le temps d’y réfléchir. Cet exercice débouche dans la majorité des cas sur des réductions de coûts et d’impacts environnementaux.»
Ce travail de réflexion implique aussi de bien connaître son produit et d’en analyser le cycle de vie comme l’ont fait les dirigeants de Victor Innovatex, un fabricant de recouvrement de meubles. «Ils se sont demandé quels étaient les impacts environnementaux de chacune des étapes du cycle de vie de leur produit, de l’extraction des matières nécessaires à la fabrication des textiles à la mise au rebut des meubles, en passant par la distribution et la consommation.»
Tout doit être pris en compte. Si on utilise un procédé moins écologique que d’autres à une certaine étape de la fabrication d’un produit, mais que cela permet, au bout du compte, d’en réduire la consommation, le bilan environnemental de ce produit sera amélioré. «Un sofa en matière synthétique qui a une durée de vie de 40 ans a peut-être une empreinte écologique moins importante que celui fait de matières naturelles que l’on jette après cinq ans», fait remarquer Marie-France Turcotte.
Selon la chercheuse, devenir une entreprise verte est un travail de longue haleine qui demande sans cesse des réajustements et des améliorations. «Les PME ont souvent des objectifs à court terme, alors que le développement durable s’inscrit dans une démarche à long terme. Il faut savoir se projeter dans l’avenir et se donner une direction», conclut-elle.