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La conscience, un phénomène mystérieux

Des experts reconnus débattront de l’évolution de la conscience, et de sa fonction, à l’École d’été 2012 de l’Institut des sciences cognitives.

Par Claude Gauvreau

14 mai 2012 à 0 h 05

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 19 h 09

Qu’est-ce que la conscience? Quand, comment et pourquoi est-elle apparue? À quoi sert-elle? Ces questions complexes, faisant l’objet de plusieurs théories scientifiques et philosophiques, seront au centre des discussions à l’École d’été 2012 de l’Institut des sciences cognitives de l’UQAM, qui se tiendra au pavillon De Sève, du 29 juin au 11 juillet prochains.

Sous le thème de l’évolution et de la fonction de la conscience, l’école réunira une soixantaine de conférenciers – philosophes, psychologues, biologistes, anthropologues, informaticiens – provenant du Canada, des États-Unis, d’Europe et d’Amérique du Sud.

Dirigée par Stevan Harnad, professeur au Département de psychologie et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en sciences cognitives, l’école soulignera également, au moyen de conférences et de films, le centième anniversaire de naissance du père de l’informatique, le mathématicien anglais Alan Turing (1912-1954). Celui qui est à l’origine des concepts d’algorithme et de calculabilité a aidé à déchiffrer les messages codés de l’armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale. «Alan Turing était un véritable génie qui a ouvert de nouvelles pistes de recherche sur le phénomène de la conscience, note Stevan Harnad. Il a fourni aux sciences cognitives une méthodologie de base et leur a donné pour mission d’expliquer la capacité d’agir de l’être humain.»

Que signifie être conscient?

Certains chercheurs expliquent l’évolution de la conscience en insistant sur l’importance de sa dimension sociale, sur les communications et interactions avec autrui. D’autres prétendent que l’aspect conscient des sensations serait apparu très tôt dans la phylogenèse, soit dans la formation des espèces. «Il n’y a pas de consensus sur la question de savoir à quel moment, dans l’évolution de la vie sur Terre, des espèces vivantes sont devenues conscientes, explique le directeur de l’école d’été. La conscience est sûrement apparue avec la complexification des systèmes nerveux. Mais on ne peut pas expliquer comment, ni pourquoi.»

Pour les adeptes de la parapsychologie (télépathie, télékinésie), la conscience serait une force de l’esprit qui décide de tout, ou presque. Pourtant, dit Stevan Harnad, «les physiciens reconnaissent aujourd’hui l’existence que de quatre forces naturelles distinctes : la force gravitationnelle, la force électromagnétique et les forces nucléaires d’interaction forte et faible (radioactivité, énergie nucléaire). Tout ce qui arrive dans l’univers s’explique par l’action de ces forces.»

Selon le chercheur, «la conscience, c’est tout ce qui est de l’ordre du ressenti» : la rougeur particulière du rouge d’une pomme, le mordant d’une morsure, la froideur de la glace.

Un problème difficile

L’existence et la nature des effets subjectifs ressentis, telles les expériences perceptives, les sensations corporelles et les émotions, sont au cœur du problème dit «difficile» de la conscience (hard problem of consciousness), auquel l’école d’été accordera une attention particulière. «Ce problème soulève la question du statut causal de la conscience elle-même, souligne Stevan Harnad. À quoi sert, biologiquement et neurologiquement, le fait d’être conscient?» Toutes les explications sur la cause de nos états d’esprit ne nous renseignent pas sur la dimension subjective de la conscience, sur les manières particulières de voir et de ressentir les choses, sur l’effet que cela produit d’être soi.

Grâce notamment aux techniques de l’imagerie cérébrale, qui permettent de visualiser les variations de l’activité du cerveau, les chercheurs en neurosciences tentent d’établir des ponts entre des états mentaux – perçus et ressentis –, donc subjectifs, et des états neuraux, observables et mesurables. «Malgré tout, l’explication du rôle de la conscience continue de soulever des difficultés et de susciter les débats», insiste le chercheur.

Stevan Harnad admet faire partie de ceux qui pensent qu’il n’existe pas, en principe, de solution au problème «difficile» de la conscience. «Un problème qui, toutefois, doit être considéré», conclut-il.