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Touche-à-tout du théâtre québécois

Par Pierre-Etienne Caza

14 avril 2008 à 0 h 04

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

«Je n’avais pas réalisé jusqu’ici la distance parcourue depuis mes études à l’UQAM, laisse tomber Claude Poissant, codirecteur artistique et directeur général du Théâtre PàP. J’ai pourtant 30 ans de métier!» Comédien, metteur en scène et auteur, Claude Poissant est le récipiendaire du Prix Reconnaissance UQAM 2008 de la Faculté des arts pour son apport exceptionnel à la scène théâtrale québécoise.

Touché par cet honneur, le lauréat dit avoir conservé d’heureux souvenirs de l’UQAM, où il a d’abord été inscrit en études littéraires – une session seulement, précise-t-il – avant de joindre ce que l’on appelait jadis le Module d’art dramatique. «Notre groupe était fascinant et les professeurs étaient rigoureux, se rappelle-t-il. Il y avait plein de projets en chantier et je passais presque toutes mes journées à l’université.» Déjà touche-àtout, Claude Poissant a été l’un des deux seuls étudiants de sa promotion à choisir de monter un spectacle solo en guise de travail de fin d’études. «Ça a été le déclencheur pour moi, raconte-t-il. J’ai entrevu le grand plaisir à faire carrière dans ce métier.»

L’aventure du PàP

Claude Poissant a fondé le théâtre Petit à petit avec une amie en 1978, deux ans après sa sortie de l’université. D’abord itinérant et voué au théâtre jeune public, le Petit à petit a développé un volet pour adulte en parallèle pendant quelques années, avant de devenir la compagnie en résidence de l’Espace GO, en 1994. «C’est à ce moment que nous avons complètement délaissé le théâtre jeune public et que Petit à petit est devenu PàP», précise M. Poissant.

Il se rappelle des débuts enthousiastes de la compagnie, alors que tout était collectif et que certains mots, comme metteur en scène, étaient bannis! «Nous contestions les modèles hiérarchiques, mais nous avons dû rapidement admettre que chacun possédait ses forces et ses faiblesses, raconte- t-il en riant. C’est à ce moment que la mise en scène a pris plus de place pour moi.»

Auteur d’une douzaine de pièces, Claude Poissant se définit comme un metteur en scène qui écrit. «La mise en scène me permet d’étudier l’être humain sous tous ses angles, ce que j’adore, et d’amener les gens avec lesquels je travaille à se dépasser», confie-t-il. Il lui arrive encore de jouer à l’occasion, mais il préfère le plus souvent laisser la place à des acteurs qui peuvent faire mieux que lui, avoue-t-il.

Parmi les pièces qui ont marqué l’histoire du PàP, on retrouve notamment Les Feluettes ou la répétition d’un drame romantique, de Michel-Marc Bouchard, mis en scène par André Brassard en 1987, ainsi que Motel Hélène, de Serge Boucher, mis en scène par René-Richard Cyr en 1997. Ce dernier a codirigé le PàP avec Poissant jusqu’en 1998.

Soixante pièces après sa fondation, le PàP mise toujours presque exclusivement sur des créations originales de jeunes auteurs québécois. «La jeunesse a cette audace permanente essentielle à la création», affirme M. Poissant, qui adore travailler avec la relève d’ici et qui a remporté de nombreux prix au fil des ans.

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En plus d’avoir mis en scène pour d’autres théâtres de nombreux classiques tels que Marivaux, Pirandello, Racine, Musset, Hugo et Tennessee Williams, Claude Poissant s’est également aventuré dans le domaine de la danse, du multimédia et de la chanson, signant la mise en scène de spectacles qui lui permettent de «garder le pied alerte», dit-il.

Sa participation à l’animation de la Soirée des Masques pendant quelques années relève également de cette insatiable curiosité. On lui a même offert d’être chroniqueur à la télé. «J’ai essayé mais j’ai détesté, admet-il. Ce que j’aime, c’est parler de théâtre et être en position de leader. Je ne suis pas à l’aise dans un carcan trop étroit.»

Claude Poissant ne passe pas une année sans donner au moins un cours ou un atelier auprès des jeunes. «J’apprends autant qu’eux en me frottant à leur réalité», dit-il. Ces tempsci, il travaille à la mise en scène du nouveau spectacle que Pierre Lapointe présentera aux Francofolies cet été. Il met également la dernière touche à la pièce Abraham Lincoln va au théâtre, écrite par Larry Tremblay, professeur de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM, qui sera présentée du 22 avril au 17 mai à l’Espace GO. «Le théâtre est un art éphémère, qui nous rappelle constamment que nous ne sommes pas grand-chose, conclut-il. Cela m’émerveille encore après toutes ces années.»