Il ne s’agit pas de la énième étude qui démontre le sous-financement de l’UQAM, mais bien de celle qui pourrait faire une différence considérable dans les rapports qu’entretiendra l’UQAM avec le reste du réseau universitaire québécois et le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS), pour les années à venir.
L’étude dont il s’agit est le Rapport du Comité des quatre experts indépendants, nommés par le recteur, et chargés d’examiner la formule de financement des universités québécoises et son impact sur l’UQAM. On peut lire le Rapport complet sur le Web à l’adresse suivante : http://www.uqam.ca/situationfinanciere/rapport26juin2008.pdf
Le président du comité, Louis Gendreau, ancien sous-ministre à l’enseignement supérieur au MELS, est catégorique : si le MELS continue à appliquer la formule de financement comme il le fait présentement, en ponctionnant l’enveloppe globale allouée aux universités pour financer les résidents en médecine, l’UQAM perdra, sur une période de 12 ans, 25 millions de dollars de ses subventions de fonctionnement, ce qui n’a évidemment aucun sens!
Tout pour la médecine
M. Gendreau est convaincu que le MELS n’était pas entièrement conscient des conséquences de la situation qu’il a engendrée en acceptant de financer, à même l’enveloppe fermée des universités, les résidents en médecine qui peuvent prolonger leur résidence de 2 à 8 ans, à raison de 52 crédits par année (plutôt que 30), alors que plusieurs centaines de nouveaux étudiants se sont inscrits en médecine ces dernières années, à la faveur du décontingentement de cette discipline, dans les quatre universités québécoises qui l’offrent, soit McGill, Montréal, Laval et Sherbrooke.
Tout le monde est d’accord qu’il y a pénurie de médecins au Québec et que la population vieillit, là n’est pas la question. Il suffirait, d’ajouter M. Gendreau, que les résidences en médecine – qui représentent des coûts énormes, mais sans doute prioritaires aux yeux du gouvernement – soient subventionnées par une enveloppe spéciale du MELS ou du Ministère de la Santé et des services sociaux, et non à même l’enveloppe globale des universités. M. Gendreau est convaincu que l’UQAM peut mobiliser des «alliés» pour défendre cette position devant le MELS, car toutes les universités payent très cher pour les résidents en médecine.
Ce constat ainsi que deux autres aussi importants pour l’UQAM – l’exigence du paiement des sommes dues en raison du reclassement des programmes de 2e et 3e cycles en environnement et l’application stricte de la formule de financement selon ce qui avait été conclu entre la CREPUQ et le MELS en 2000 – constituent le «coeur du rapport», au dire du président du comité.
9 millions pour l’environnement
Si l’UQAM récupère du MELS les 9 millions de dollars «à titre de correction rétroactive des subventions de fonctionnement» pour la période de 2000 à 2006, alors que les programmes des cycles supérieurs en environnement n’étaient pas classés en «sciences» mais dans la catégorie «multidisciplinaire», qui bénéficiait du financement le plus bas, et s’assure que tous ses programmes sont bien classés, elle pourrait profiter au maximum de la formule actuelle de financement.
De plus, l’UQAM se doit d’exiger, avec ses homologues du réseau québécois des universités, indique M. Gendreau, que le Ministère applique la formule de financement et la grille de pondération telles qu’elles ont été acceptées en 2000 par tous les partenaires, plutôt que de la façon dont le MELS a choisi de les appliquer à compter de 2006, en changeant unilatéralement le poids accordé à certaines disciplines (ex. médecine et nursing) et en favorisant les universités en région et les universités monodisciplinaires. L’UQAM ne pourrait plus dire, alors, qu’elle est «sousfinancée» au chapitre de l’enseignement, explique M. Gendreau : les critères de pondération et leur application seraient les mêmes pour tous. Actuellement, précise-t-il, presque 50 % des sommes dues à l’enseignement sont réparties selon des critères décidés par le MELS et 50 % selon la grille de pondération agréée par les universités, ce qui crée des distorsions énormes entre les universités.
Autres constats
Au sujet des frais afférents, le rapport plaide pour que les universités (dont l’UQAM) qui sont très loin de la moyenne établie par le MELS dans sa loi bloquant les hausses démesurées de ces frais aux étudiants, puissent avoir une compensation financière.
De même, l’UQAM pourrait revendiquer des frais deux fois plus élevés que ce que lui accorde le MELS pour la sécurité et l’entretien. Étant au centre-ville, à la croisée des deux lignes principales de métro, l’UQAM est la seule université à Montréal qui doit verrouiller en tout temps les portes des classes inoccupées pour ne pas se faire dévaliser. L’Université touche déjà une prime de 25 %, que lui octroie le MELS pour les coûts supérieurs de sécurité qu’elle doit assumer, mais 50 % serait plus équitable aux yeux des quatre experts signataires du rapport, explique M. Gendreau.
Le rapport évalue à 19 millions de dollars annuellement – 8 M $ pour l’année courante et 11 M $ sur le long terme – les revenus supplémentaires réalisables pour l’UQAM et sa composante TÉLUQ, si les 20 recommandations étaient prises en compte par le MELS et les autres partenaires du réseau, auxquels s’ajoutent les 9 M $ déjà mentionnés pour l’environnement, qui ne seraient octroyés qu’une seule fois.
En conclusion
M. Gendreau estime que le rapport donne à l’UQAM un plan de travail pour discuter avec le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport de façons très concrètes de bonifier son niveau de financement. «L’UQAM ne s’en sortira pas autrement», de préciser l’expert. «S’il est vrai que le MELS veut venir en aide à l’UQAM, nous lui donnons les moyens d’y arriver, et ce, sans que ce soit fait au détriment des autres universités. La situation en médecine, par exemple, est intenable pour tous les membres du réseau universitaire. L’UQAM ne peut pas simplement couper, elle doit trouver des moyens de hausser son niveau de financement.»
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Ont travaillé au Rapport du Comité d’experts indépendants chargé d’examiner la formule de financement des universités québécoises et son impact sur l’UQAM, de façon entièrement bénévole :
- Louis Gendreau, président du comité
- Michèle Fortin
- Louis Chapelain
- Michel Trahan