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Qualité du français des enseignants : un premier examen national

Par Claude Gauvreau

28 avril 2008 à 0 h 04

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

Le test SEL de français écrit de la TÉLUQ a fait couler beaucoup d’encre récemment, mais son rejet par le ministère de l’Éducation ne signifie pas que l’on prend les choses à la légère. À compter de l’automne 2008, tous les étudiants en formation des maîtres qui seront admis dans les universités québécoises francophones devront subir un nouveau test. Cet examen uniforme, plus exigeant que ceux imposés actuellement, a été conçu par un comité d’experts de la Fédération des commissions scolaires, des universités et du ministère, en collaboration avec le Centre d’évaluation du rendement en français écrit (Céfranc), un consortium associé aux commissions scolaires montréalaises.

Le test sera prêt d’ici l’été prochain et validé au cours de l’automne, souligne Marc Turgeon, doyen de la Faculté des sciences de l’éducation. «En 2005, rappelle-t-il, les universités francophones avaient déjà convenu, dans le cadre d’une politique, de la nécessité d’un examen national pour les futurs enseignants. Nous voulions également qu’il soit reconnu par l’ensemble des commissions scolaires pour éviter qu’elles en imposent un autre au moment de l’embauche.»

Le processus de discussion qui a suivi cette politique a été inutilement long, explique M. Turgeon. «Pour développer le nouveau test, les universités, les commissions scolaires et le ministère avaient créé un comité d’experts auquel s’était joint le Service d’évaluation linguistique (SEL) de la Téluq. Malheureusement, le SEL a adopté une approche essentiellement commerciale en proposant des coûts de passation trop élevés pour les étudiants. Un projet d’examen a finalement été proposé, expérimenté, puis amélioré parce que certaines questions étaient mal conçues et mal formulées. Le comité a alors suggéré une nouvelle validation auprès d’un échantillon d’étudiants plus représentatif, mais la Téluq a refusé C’est pourquoi le Céfranc a été choisi comme nouveau partenaire.»

Un taux d’échec global de 63 %

Depuis cinq ans, les étudiants des baccalauréats en enseignement de l’UQAM font le test SEL de certification en français écrit, obligatoire pour l’obtention du diplôme et du brevet d’enseignement. Dès la première année, ils sont d’abord soumis à un test diagnostique qui permet d’identifier leurs lacunes et leurs besoins. Par la suite, ils doivent réussir le test SEL au cours des deux premières années de leur scolarité.

Le test comprend deux parties. La première porte sur l’orthographe grammaticale et lexicale, la ponctuation, la syntaxe et le vocabulaire, et la deuxième sur la rédaction d’un texte. En cas d’échec, les étudiants ont droit à deux reprises avant d’effectuer leur stage en troisième année. S’ils les échouent, ils sont suspendus de leur programme pendant un an, période au cours de laquelle ils peuvent se perfectionner. Puis, ils ont droit à une dernière reprise dont l’échec entraîne l’expulsion du programme.

Le seuil de réussite exigé est de 85 % dans les programmes d’éducation préscolaire et enseignement primaire, enseignement en adaptation scolaire et sociale et enseignement du français au secondaire. Dans tous les autres, le seuil est de 75 %. Des 1 042 étudiants inscrits dans les programmes de formation à l’enseignement à l’automne 2007, 562 ont passé le test jusqu’à maintenant. De ce nombre, 60 % ont échoué la première partie (code linguistique) et 34 % la deuxième (rédaction), pour un taux d’échec global de 63 %. Enfin, la note moyenne obtenue est de 75,6 % concernant le code linguistique, contre 79,8 % en rédaction.

La compétence à communiquer oralement fait aussi l’objet d’une évaluation, moins contraignante cependant que le test SEL. L’examen consiste en la présentation d’un exposé oral et le seuil de réussite est de C. En cas d’échec, on doit s’inscrire à des cours d’appoint et les réussir.

L’objectif du test écrit n’est pas de piéger les étudiants, mais d’évaluer s’ils sont capables de rédiger correctement un texte et, surtout, de repérer, corriger et expliquer des fautes de français, ce qui constitue la tâche de tout enseignant, souligne M. Turgeon. «La situation, sans être désespérante, est préoccupante parce que l’on aimerait que le taux d’échec soit moins élevé. Les notes obtenues par la majorité des étudiants se situent quand même entre 75 % et 85 %, et après les trois premières années d’études, le nombre d’étudiants encore en difficulté est peu élevé.»

Les étudiants disposent en effet de différentes ressources pour parfaire leurs connaissances en français écrit, poursuit le doyen. Ils peuvent notamment suivre des cours d’appoint et recourir aux services de tutorat et de monitorat offerts par le Centre d’aide à la réussite (CARÉ) de la faculté.

Marc Turgeon se demande s’il ne faudrait pas développer davantage de cours de grammaire dans les cégeps pour les futurs enseignants et exiger la réussite de certains cours. «Chose certaine, on doit implanter une culture de la formation continue, lance-t-il. Rien n’oblige actuellement les enseignants à suivre une formation pour qu’ils améliorent leurs compétences. La maîtrise du français et la promotion de son importance et de sa qualité sont pourtant la responsabilité de tous les enseignants, quelle que soit leur matière.»