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Problématique des migrants haïtiens en République Dominicaine

Par Pierre-Etienne Caza

17 mars 2008 à 0 h 03

Mis à jour le 17 avril 2015 à 16 h 04

La situation politique et économique en Haïti a poussé des centaines de milliers de personnes à quitter le pays depuis des décennies. Plusieurs se sont réfugiées en République Dominicaine, le pays voisin, dans l’espoir d’y trouver du travail, notamment dans les plantations de coton. Sans statut officiel, ces migrants n’ont aucun recours devant la loi.

Grâce à une collaboration avec le Service aux collectivités (SAC), le professeur Bernard Duhaime, du Département des sciences juridiques, s’est rendu en République Dominicaine et en Haïti l’an dernier afin de donner des formations aux membres de deux organisations locales représentant des victimes de violation des droits humains.

Ce n’était pas la première fois que le professeur Duhaime collaborait avec ces organismes puisqu’il dirige la Clinique internationale de défense des droits humains (CIDDHU) de l’UQAM, impliquée depuis quelques années dans ce dossier. Là-bas, ce ne sont pas seulement les migrants haïtiens qui sont victimes d’injustice; leurs enfants aussi, même s’ils sont nés en sol dominicain. «Le droit national prévoit que toute personne qui n’est pas en transit et qui naît dans le pays obtient sa citoyenneté, mais ce n’est pas le cas dans la réalité, explique M. Duhaime. Les autorités font souvent preuve de discrimination et privent les enfants des migrants de tout statut officiel, ce qui les empêche d’accéder au système de santé, d’éducation et de justice. Parents et enfants sont donc vulnérables, pouvant être exploités, menacés ou expulsés. Dans certains cas, c’est leur intégrité physique qui est en danger.»

En République Dominicaine, où il a été reçu en mai dernier par le doyen de la Faculté de droit de l’Université autonome de Santo Domingo, Bernard Duhaime a donné une conférence très médiatisée avant de se rendre sur le terrain, où il s’est penché sur un cas d’exactions commises par les autorités locales, pour lequel les victimes n’ont pu obtenir justice. «En droit international, il faut épuiser tous les recours juridiques nationaux afin de s’adresser à une instance internationale, explique-t-il. Les organisations qui m’ont invité se préparent à cette éventualité et elles avaient besoin de perfectionnement au niveau méthodologique et stratégique.»

Le même scénario s’est répété en Haïti au mois d’août, où le Bureau de promotion des droits de la personne de l’Organisation des États américains était impliqué dans l’aventure. Depuis le retour du professeur Duhaime, des étudiants ont effectué des stages auprès de ces mêmes organismes.

Le Service aux collectivités

C’est le Comité québécois pour la reconnaissance des droits des travailleurs haïtiens en République Dominicaine qui a formulé une demande au SAC afin que le professeur Duhaime bénéficie d’un dégrèvement lui permettant d’aller offrir 45 heures de formation.

N’importe quel organisme communautaire, groupe de femmes ou organisation syndicale peut faire une demande au SAC afin d’avoir accès à une ressource universitaire pour de la formation, de la recherche ou toute autre expertise. Le SAC a la possibilité d’octroyer 20 dégrèvements par année. «C’est plutôt rare que nous ayons des projets internationaux comme celui-ci, précise Carmen Fontaine, agente de développement au SAC, car les organismes doivent alors se débrouiller pour amasser l’argent nécessaire pour le déplacement du professeur. Le dégrèvement ne couvre que le temps passé en formation.»

Il s’agissait de la première collaboration entre le SAC et la CIDDHU. «Nous espérons que les gens qui ont assisté aux formations données par M. Duhaime puissent ensuite former à leur tour d’autres personnes dans leur coin de pays, ajoute Mme Fontaine. La notion de partage et de transfert des connaissances est notre raison d’être.»

«Mon défi n’est pas seulement d’enseigner et de faire de la recherche, c’est aussi de mettre au bénéfice de la société l’expertise que l’on développe, conclut Bernard Duhaime. Cela fait partie de la mission fondamentale de l’UQAM et le SAC y contribue de belle façon.»