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Pour une sociologie vivante et accessible

Par Claude Gauvreau

12 mai 2008 à 0 h 05

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

Arrivés à Montréal en septembre dernier, Salim Beghdadi et Quentin Delavictoire n’ont pas tardé à faire parler d’eux. Venus de France, ces deux jeunes doctorants en sociologie viennent de créer un site Internet unique en son genre, qui comprend une revue électronique, Horizon sociologique, des entretiens filmés avec des sociologues et un forum de discussion. Le tout avec la bénédiction du Département de sociologie et de la Faculté des sciences humaines qui leur ont accordé le coup de main financier nécessaire à la construction du site.

Notre objectif, disent les deux étudiants, est de valoriser la sociologie et ses protagonistes. «L’idée, au départ, était de sortir la sociologie de son cadre institutionnel et de permettre aux étudiants d’avoir facilement accès aux travaux des chercheurs», explique Salim. «Nous voulions créer une plateforme multimédia réunissant, côte à côte, deux outils d’expression habituellement séparés : une revue électronique et la vidéo, poursuit Quentin. On espère ainsi atteindre non seulement un public dit spécialisé, mais aussi un public plus large qui n’a pas l’habitude de lire des revues scientifiques. Des cégépiens qui s’interrogent sur ce qu’est la sociologie seront peutêtre davantage portés à regarder un entretien filmé qu’à lire un long article savant.»

Place aux jeunes chercheurs

La revue Horizon sociologique donnera la parole à des chercheurs expérimentés et publiera des textes de jeunes chercheurs : travaux de recherche, articles, communications scientifiques, compte rendus de livres, etc. «Contrairement aux revues institutionnelles qui leur accordent peu d’espace, nous voulons permettre aux étudiants de maîtrise et de doctorat de s’exprimer», souligne Salim.

Chaque numéro de la revue traitera de problèmes concrets liées à l’actualité, à partir d’un thème général. La première édition, qui sera bientôt mise en ligne, aura pour thème «Autour du politique» et contiendra un texte de présentation de Jacques Beauchemin, directeur du Département de sociologie, ainsi que des articles d’étudiants sur l’Islam politique, le transexualisme, les politiques sociales au Québec et les blogues politiques, précise Quentin. «Une étudiante de Lausanne, en Suisse, nous a même envoyé un texte sur le drapeau européen.»

Les deux étudiants entendent refléter la diversité des courants de pensée dans l’étude des phénomènes sociaux parce qu’ils croient en une sociologie plurielle. C’est pourquoi ils privilégient la rigueur dans l’approche et l’expression, plutôt qu’une démarche ou un objet d’étude particulier.

Des témoignages personnels

Salim et Quentin ont filmé et monté eux-mêmes les premiers entretiens avec André Mondoux, chargé de cours au Département de sociologie et spécialiste des nouvelles technologies, et avec le professeur Sid Ahmed Soussi, du même département, qui s’intéresse au monde du travail. Tous les entretiens traiteront dans une première partie des travaux d’un chercheur et de sa démarche scientifique. Dans la seconde, les chercheurs parleront de leurs références culturelles et expériences plus personnelles qui ont nourri leur réflexion. «Un sociologue nous a raconté, par exemple, que la lecture des romans de San Antonio l’avait aidé à développer un style d’écriture plus vivant. C’est le type de témoignage qu’on entend rarement dans un colloque scientifique», observe Quentin. Enfin, les chercheurs sont invités à commenter un livre, essai ou roman, qu’ils auront lu.

Les deux doctorants sont à la recherche de sources de financement stables parce qu’ils veulent faire vivre leur site le plus longtemps possible, même lorsqu’ils seront de retour en France après leur doctorat. Ils ont en effet plusieurs projets en tête, comme la production d’un DVD réunissant les entretiens filmés et la mise en ligne de documentaires et de films de fiction porteurs d’un regard sociologique. Entre temps, ils participeront en juillet au colloque de l’Association internationale des sociologues de langue française qui a lieu en Turquie et, comme ils ont de la suite dans les idées, ils profiteront de l’occasion pour filmer l’événement.

Participant respectivement aux travaux du Collectif de recherche sur l’itinérance (CRI) et du Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST), Salim et Quentin disent apprécier le travail d’équipe et les liens avec le milieu. «En apprenant à appliquer les connaissances sur le terrain, on sent qu’on est dans l’action», disent-ils.