Comprendre les nouvelles formes d’oeuvres littéraires et artistiques créées sur internet est au centre des préoccupations de Bertrand Gervais, professeur au Département d’études littéraires et directeur de NT2, Laboratoire de recherche sur les oeuvres hypermédiatiques, et de Figura, le Centre de recherche sur le texte et l’imaginaire, qui a reçu récemment une importante subvention du Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FQRSC).
Fondé il y a quatre ans et soutenu financièrement par la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI), NT2 propose sur son site Internet un répertoire permettant d’identifier, de cataloguer et d’étudier des oeuvres hypermédiatiques présentement disponibles sur le Web. « Notre répertoire comprend 3 000 descriptions d’oeuvres et 3 000 autres attendent d’être mises en ligne», précise M. Gervais. Peu connues et dispersées, ces oeuvres sont le fruit de jeunes artistes et auteurs originaires d’Europe, des États-Unis et du Québec, qui ont grandi avec Internet et qui exploitent aujourd’hui les possibilités graphiques de l’ordinateur.»
Le directeur de NT2 utilise la métaphore du labyrinthe pour caractériser les oeuvres hypermédiatiques parce qu’elles remettent en cause les formes traditionnelles de narrativité. «Les hypertextes brisent la ligne continue du récit qui s’ouvre sur d’autres textes et côtoie parfois des images et des sons dans un rapport de complémentarité ou de prolongement. Pour analyser leur caractère hybride et interactif, nous devons renouveler notre méthodologie et notre vocabulaire», souligne-t-il. Difficile, en effet, d’analyser une oeuvre comme Love is… d’Alan Bigelow, qui amalgame son, texte et vidéo. L’oeuvre s’ouvre sur un article de dictionnaire définissant l’amour. L’internaute peut ensuite cliquer sur des portraits de gens exposant leur conception et laisser sa propre définition. Cette dernière est intégrée à l’oeuvre, qui devient alors une sorte de portrait contemporain de l’amour.
Le site de NT2 offre également un espace d’exploration/création, l’Ouvroir des arts et littératures hypermédiatiques, qui veut favoriser la production et la diffusion d’oeuvres originales et faire connaître les travaux de recherche-création des membres de NT2 et du Centre de recherche Figura. On y trouve notamment la base de données du projet Lower Manhattan sur les mises en récit et les représentations des attentats du 11 septembre 2001.
«La littérature hypermédiatique pouvait être considérée comme marginale il y a quatre ans, mais c’est de moins en moins vrai aujourd’hui», affirme Bertrand Gervais. Son laboratoire de recherche vient d’ailleurs de créer bleuOrange, la seule revue virtuelle de création littéraire hypermédiatique au Québec, dont le lancement a permis de rassembler une centaine de personnes.