Passé la fleur de l’âge, plus notre gâteau d’anniversaire compte de bougies, plus nos capacités intellectuelles s’amenuisent. Je vieillis, donc j’oublie. Vraiment? Pour Louis Bherer, directeur du nouveau Laboratoire d’étude sur la santé cognitive des aînés (LESCA) de l’UQAM, il s’agit plutôt d’un mythe. «Il y a des centenaires qui jouissent d’une vitalité intellectuelle impressionnante», fait-il remarquer.
Jeune professeur au Département de psychologie, ce neuropsychologue s’était intéressé à la variabilité des profils cognitifs chez les personnes âgées, pendant ses études doctorales et postdoctorales. Son constat : la plupart des personnes très alertes faisaient régulièrement de l’exercice, s’alimentaient sainement et demeuraient actives sur le plan intellectuel.
Pourrait-on, grâce à un programme d’entraînement physique et intellectuel, limiter et même renverser le déclin des capacités cognitives chez les aînés qui ont fait preuve de négligence envers leur santé ? Dans quelle mesure? C’est ce que le chercheur veut maintenant découvrir.
Grâce à un projet de plus de 800 000 dollars de la Fondation canadienne de l’innovation (FCI), il vient d’équiper son laboratoire – situé à l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, sur la rue Queen-Mary – de tapis roulants et de bicyclettes stationnaires. Chaque semaine, des dizaines de personnes âgées s’y rendent et se soumettent à un programme d’exercices. Ils s’échinent aussi devant des ordinateurs, s’exerçant à des jeux vidéo conçus sur mesure pour stimuler certaines régions de leurs cerveaux, principalement celles responsables du contrôle de l’attention.
Le professeur n’est pas encore prêt à dévoiler de chiffres, mais déjà, il affirme avoir vu des progressions fulgurantes chez les participants. «Différents tests cognitifs montrent, par exemple, que les sujets entraînés ont plus de facilité à faire deux tâches en même temps, révèle-t-il. C’est l’une des premières habiletés à faillir lors d’un vieillissement cognitif normal.»
Grâce à un tout nouvel équipement d’imagerie optique, également financé par la FCI, le chercheur pourra bientôt pousser son analyse plus loin, en regardant l’activation de zones clés dans le cerveau des participants pendant qu’ils exécutent une tâche. Le test sera effectué avant et après la session d’entraînement.
Les résultats de Louis Bherer suscitent autant d’espoir que d’intérêt. Les médias sont de plus en plus nombreux à le solliciter et le chercheur est invité à participer à des conférences scientifiques aux quatre coins de la planète. «Quand j’ai commencé à me pencher sur la santé cognitive des aînés, on montrait peu d’intérêt pour ce sujet dans les universités. Heureusement, l’UQAM y a cru et n’a pas hésité à appuyer ma demande à la FCI, même si elle était peu conventionnelle.»