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COVID-19: la colchicine sauve des vies

Une étude clinique démontre l’efficacité du médicament pour réduire les complications, les hospitalisations et la mortalité.

Par Marie-Claude Bourdon

25 janvier 2021 à 6 h 01

Mis à jour le 27 janvier 2021 à 7 h 01

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Toutes les nouvelles entourant la COVID-19 et les analyses des experts sur la crise sont réunies dans cette série.

La colchicine est un médicament déjà disponible en pharmacie, peu coûteux et dont les effets secondaires sont déjà bien documentés. Photo: Getty images

Une étude menée à l’Institut de Cardiologie de Montréal a permis d’obtenir des résultats convaincants sur l’efficacité de la colchicine pour réduire les complications liées à la Covid-19. Le chargé de cours du Département des sciences biologiques David Rhainds a participé à cette étude menée par le Dr Jean-Claude Tardif, directeur du Centre de recherche de l’Institut de cardiologie.

Entreprise au printemps dernier, l’étude COLCORONA est la première au monde à démontrer l’efficacité d’un médicament oral chez les patients à risque en phase pré-hospitalière. L’’étude a porté sur 4 488 patients et a permis de réduire le risque d’hospitalisation ou de décès de 21%. Les résultats ont été encore plus significatifs si l’on considère seulement les 4 159 patients chez qui le diagnostic de Covid-19 a été prouvé par un test naso-pharyngé (PCR). Chez ces patients, les hospitalisations ont été réduites de 25%, le besoin de ventilation mécanique de 50% et les décès de 44%.

«Prescrire la colchicine dès la confirmation du diagnostic permet de réduire les risques de développer une forme grave de la maladie, explique David Rhainds. Le but est de contribuer à désengorger les systèmes de santé à travers le monde, tout en sauvant des vies.» La réduction du besoin de ventilation mécanique de 50% est aussi très significative, note le chercheur. «On sait qu’un patient qui n’a pas été intubé a beaucoup moins de risque de souffrir de séquelles.»

Déployée au Canada, aux États-Unis, en Europe, en Amérique du Sud et en Afrique du Sud, l’étude randomisée et à double insu a porté sur des patients de 40 ans et plus comportant au moins un facteur de risque de complications de la Covid-19 (comme le surpoids, le diabète ou l’hypertension).

La colchicine, rappelle David Rhainds, est un médicament déjà disponible en pharmacie, peu coûteux et dont les effets secondaires sont déjà bien documentés. La molécule est, en effet, utilisée depuis longtemps pour ses propriétés anti-inflammatoires dans le traitement de la goutte et de certaines autres conditions médicales. Dans le cadre d’une autre étude portant sur la colchicine, en 2019, l’équipe du Dr Jean-Claude Tardif a d’ailleurs démontré son efficacité pour réduire le risque d’incidents cardiaques secondaires chez des patients ayant souffert d’un infarctus du myocarde.

Un article scientifique sur les résultats de l’étude COLCORONA est en cours de rédaction et sera soumis incessamment, précise David Rhainds. Sur la base de ces données, les médecins pourraient ensuite commencer à prescrire la colchicine à leurs patients. Comme le médicament est déjà disponible sur le marché, cela pourrait aller très vite.

«Ce n’est pas une procédure exceptionnelle, note David Rhainds. Une autre molécule anti-inflammatoire déjà connue, la dexaméthasone, fait partie des médicaments les plus utiles aux soins intensifs à travers le monde pour traiter les complications de la Covid-19.»

Même si l’étude COLCORONA a porté sur des patients de plusieurs pays, la majorité (environ 3 000) provenaient du Québec. Comme il ne s’agit pas d’un nouveau médicament, elle n’a pas été financée par l’industrie pharmaceutique, mais par des fonds du gouvernement du Québec, des National Institutes of Health (NIH) américains et de diverses fondations privées, dont la philanthrope montréalaise Sophie Desmarais.

David Rhainds, qui travaille à l’Institut de Cardiologie depuis 2009, a été nommé directeur adjoint du Centre de recherche en juillet dernier. Il est chargé de cours à l’UQAM depuis 2002, où il enseigne la physiologie humaine, la biochimie et la biologie cellulaire.

Annoncés vendredi soir, les résultats de l’étude COLCORONA ont rapidement fait le tour du monde, alimentant les espoirs dans le combat contre la Covid-19.