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Au cœur de la recherche-création

Le centre de recherche-création en arts médiatiques Hexagram multiplie les projets en 2015.

Par Valérie Martin

8 janvier 2015 à 10 h 01

Mis à jour le 14 janvier 2015 à 9 h 01

Le projet Tryphons de l’artiste-designer Nicolas Reeves, membre d’Hexagram et professeur à l’École de design. Présenté en 2013, le projet d’installation-performance, soutenu par le centre Hexagram, était composé de cubes robotisés remplis d’hélium.Photo: Mathieu Pothier

Le dernier séminaire international de la série des Syncretic Transcodings_4 réunissait, en mai 2014, des chercheurs et des artistes dans le but de réfléchir aux enjeux des transformations se produisant aux limites de la matérialité physique, résiduelle, biologique et électronique. Les résidences d’artistes HEXA_IN permettent à des artistes-chercheurs des quatre coins du monde d’être jumelés avec des membres du centre de recherche Hexagram le temps d’une rencontre, d’un atelier ou d’un séjour. Dans le cadre de la série des Conférenciers distinguées, qui présentent des figures éminentes des arts médiatiques et de la culture numérique, la chercheuse Sissel Tolaas, du SMEll RE_searchlab, à Berlin, dont les recherches portent sur l’odorat, la communication et le langage, a prononcé en janvier 2014 une conférence sur les possibilités des molécules olfactives pour nous aider à mieux comprendre et à définir notre environnement.

Gisèle TrudelPhoto: Émilie Tournevache

Ces projets sont rendus possibles grâce à Hexagram, un réseau international, qui a son siège à l’UQAM et à l’Université Concordia, dédié à la pratique créative et à la recherche-création en arts médiatiques, technologie, design et culture numérique. Le réseau regroupe une centaine de membres: des artistes et des chercheurs spécialisés dans le domaine des technologies numériques, mais aussi d’autres chercheurs provenant de disciplines comme la sociologie, l’histoire de l’art, l’anthropologie, la philosophie et la communication. «C’est le seul centre de ce genre au Canada, explique Gisèle Trudel, de l’École des arts visuels et médiatiques, qui agit à titre de codirectrice d’Hexagram depuis 2011 en collaboration avec le professeur Chris Salter, de l’Université Concordia. Il a une identité particulière parce qu’il est doté de studios et de laboratoires de recherche et de création à la fine pointe de la technologie, en raison d’importantes subventions obtenues au fil des années, et parce qu’on y retrouve une grande diversité de recherches menées dans un esprit transdisciplinaire.»

La recherche-création

Hexagram, dont la mise sur pied remonte au début des années 2000, a développé un modèle de recherche-création repris un peu partout dans le monde. «C’est un modèle intégré de théorie et de pratique, décrit Gisèle Trudel. La recherche-création lie des champs d’études comme les sciences humaines et sociales à des domaines dits de création comme l’art et le design afin de créer de nouveaux savoirs au moyen de pratiques matérielles et performatives.»

Ce modèle de recherche découle en partie de l’intégration des artistes au monde académique et universitaire dans les années 1990 et 2000, rappelle la professeure. «À l’université, les artistes placent leurs pratiques artistiques dans des contextes beaucoup plus larges tout en ayant recours à différentes disciplines pour enrichir leurs démarches et leurs créations.» On s’éloigne du concept de l’artiste seul dans son atelier, remarque Gisèle Trudel, qui a eu une pratique artistique professionnelle pendant plusieurs années avant d’être embauchée à l’UQAM en 2003.

Une nouvelle programmation

Le comité de direction du réseau Hexagram a mis sur pied pour la période 2014-2020 une nouvelle programmation comportant trois axes de recherche – la matérialité, l’ubiquité ainsi que le mouvement, l’embodiment et les sens. Ces trois axes reflètent les tendances observées depuis quelques années dans le domaine de la recherche théorique et de la pratique matérielle. «Nous avons bâti cette programmation à partir, notamment, des différents sujets de recherche de nos membres sans vouloir imposer de thèmes», explique Gisèle Trudel.

Parmi les événements qui auront lieu durant l’année, on compte un séminaire intitulé «Traduction disciplinaire: exploration de passerelles scientifiques», qui se tiendra en avril au Cœur des sciences de l’UQAM. L’événement, sous la direction du professeur et directeur de l’École des arts visuels et médiatiques Mario Côté, a été élaboré en collaboration avec le Réseau international Ambiances, qui s’intéresse à la recherche en matière d’ambiances architecturales et urbaines.

Organisée par Hexagram, la conférence internationale Media Art History, qui aura lieu du 5 au 8 novembre au Cœur des sciences, soulignera le 10e anniversaire de l’événement. Intitulé Re-Create 2015, l’événement aura pour thème la recherche-création technologique et se penchera sur les théories, les méthodes et les pratiques de la recherche-création. «Cette conférence s’inscrit parfaitement dans la lignée d’Hexagram et de ses intérêts de recherche, souligne Gisèle Trudel, qui agira à titre de codirectrice de la conférence. Cet événement est en quelque sorte la suite logique d’un colloque que nous avions organisé au printemps 2014 à l’UQAM autour du thème de la recherche-création.» La conférence sera offerte en version bilingue et différée sur le Web.

Tous les événements récents d’Hexagram sont par ailleurs disponibles en ligne sur Vimeo, un site Web de partage de capsules vidéo, dont la série de tables-rondes Hexa_Out visant à susciter les échanges et les discussions entre des membres d’Hexagram et des chercheurs en arts médiatiques. Ces événements extra-muros qui se déroulent en présence d’un médiateur sont l’occasion de prendre le pouls de la recherche-création. «Nous cherchons toujours à innover dans la manière de faire nos présentations et de documenter nos activités de diffusion», dit Gisèle Trudel.

La nouvelle série de conférences Leonardo Art Science Evening Rendezvous (Laser), présentée pour la première fois au Canada en novembre dernier à la galerie Oboro, rappelle le concept d’Hexa_Out. Lancée par Hexagram en partenariat avec Leonardo, un réseau international de chercheurs et d’artistes dont les intérêts de recherches sont basés sur la transdisciplinarité et l’innovation, la série rassemble dans un lieu donné des chercheurs, des étudiants et des médiateurs autour de thèmes combinant l’art, la science et la technologie.

Un peu d’histoire

Hexagram a d’abord été un ONBL indépendant de l’Université. Grâce à d’importantes subventions versées par la Fondation canadienne pour l’innovation, l’institut avait pour but de développer des infrastructures et de permettre à ses membres de mener des projets créatifs pour l’industrie tout en offrant des lieux rassembleurs pour les chercheurs et les créateurs. «Durant cette période, le professeur associé Michel Fleury, de l’École de design, un mathématicien et créateur de personnages virtuels, a notamment conçu un logiciel d’animation qui a par la suite été commercialisé par la firme Autodesk», illustre Gisèle Trudel.

Faute de renouvellement de fonds, l’aventure a pris fin en 2008 et a mené à la formation de nouveaux organismes, soit le Consortium en innovation numérique du Québec (CINQ), un organisme indépendant octroyant des fonds pour des projets de recherche sur les technologies médiatiques, ainsi que les plateformes de recherche universitaires Hexagram UQAM et Hexagram Concordia. En 2011, dans la foulée des recommandations du Fonds de recherche Société et culture (FRQSC), les deux antennes universitaires et le Centre interuniversitaire des arts médiatiques (CIAM) de l’UQAM ont formé un seul organisme, HexagramCIAM. Le centre est aujourd’hui reconnu comme un vaste réseau international de chercheurs interdisciplinaires et d’artistes.