Sept diplômés de l’UQAM seront honorés à l’occasion du Gala Reconnaissance 2014 pour leur cheminement exemplaire et leur engagement. Ce texte est le quatrième d’une série de sept articles présentant les lauréats.
Atypique, hors normes. Ces termes qualifient bien le parcours de Michèle Marchand (B.A. philosophie, 92; M.A. philosophie, 98; Ph. D. philosophie, 05), conseillère en éthique clinique auprès de la direction générale du Collège des médecins du Québec et secrétaire du groupe de travail en éthique clinique de cet organisme.
Après avoir obtenu un doctorat en médecine de l’Université de Montréal, en 1973, Michèle Marchand a pratiqué la médecine familiale pendant plus de 20 ans à la Clinique des citoyens de Saint-Jacques, puis dans un cabinet privé, situés dans un quartier populaire de Montréal. «J’ai exercé la médecine en milieu ouvrier par choix personnel, parce que cela correspondait à mes convictions politiques, dit-elle. À l’Université de Montréal, j’étais membre du comité d’action politique de la Faculté de médecine, qui prônait une médecine sociale.»
Parallèlement à son travail, Michèle Marchand entreprend, en 1982, des études de baccalauréat en philosophie à l’UQAM, en suivant un cours par session à titre d’étudiante libre, puis complète une maîtrise dans la même discipline. «J’ai mis près de 10 ans à terminer mon bac, tout en travaillant à temps plein et en élevant mes enfants. Je n’aurais pas pu suivre un tel parcours dans une université autre que l’UQAM», reconnaît-elle.
Au tournant des années 2000, ayant franchi le cap de la cinquantaine, elle réoriente sa carrière. Elle abandonne la pratique médicale et offre ses services au Collège des médecins, qui a mis sur pied un groupe de travail en éthique clinique, dont le rôle consiste à assurer une réflexion continue sur la dimension éthique des problèmes rencontrés dans la pratique de la médecine. Michèle Marchand coordonne les activités du groupe et participe à l’élaboration des prises de position du Collège relativement aux questions ayant des incidences sur le plan moral. «Au cours des 15 dernières années, rappelle-t-elle, le Collège a traité plusieurs dossiers complexes – développement de la génétique, procréation assistée, don d’organes, acharnement thérapeutique, suicide assisté, euthanasie – qui ont souvent été au centre du débat public.»
Michèle Marchand se lance également dans des études de doctorat en philosophie. Sa thèse, L’éthique comme critique de nos pratiques sociales: l’exemple de l’éthique médicale, sera publiée en 2009 sous le titre Éthique et pratiques sociales: essai de morale réaliste. «En matière d’éthique, les médecins ne peuvent pas agir uniquement selon leurs convictions personnelles. Ils doivent composer avec les normes morales de la société et avec celles qui encadrent leur profession, lesquelles ne cessent d’évoluer. Aujourd’hui, tous les codes de déontologie médicale insistent sur l’importance de respecter l’autonomie des patients, ce qui n’était pas le cas auparavant.»
Le Collège et sa conseillère ont joué un rôle important dans le processus de réflexion ayant conduit au projet de loi 52 sur l’aide médicale à mourir. «Celui-ci a retenu l’idée que l’aide médicale à mourir s’inscrivait dans le continuum des soins de fin de vie. Il a aussi reconnu que ces soins sont plus appropriés quand ils sont le fruit d’un processus décisionnel bien mené, qui respecte la volonté du patient ou de ses proches et le jugement professionnel du médecin.» Cela dit, le projet de loi n’est pas sans failles, note Michèle Marchand. «Il n’aborde pas la question des patients inaptes, laquelle doit être débattue. On pourrait ne pas priver un patient inapte de l’aide médicale à mourir en utilisant les mécanismes auxquels nous recourons déjà dans nos décisions de soins, soit le consentement substitué, les directives anticipées et l’appel au tribunal en cas de litige.»