Voir plus
Voir moins

L’Inde s’ouvre à la culture inuite

Le premier roman inuit du Québec sera traduit en hindi et en marathi.

Par Jean-François Ducharme

14 octobre 2014 à 14 h 10

Mis à jour le 10 février 2016 à 10 h 02

Le harpon du chasseur sera traduit en hindi et en marathi. Photo: Presses de l’Université du Québec

Des millions d’Indiens auront bientôt accès à un roman phare de la culture du Grand Nord québécois. Vidya Vencatesan, directrice du Département de français de l’Université de Mumbai, en Inde, fera traduire un roman inuit dans deux langues indiennes, le hindi – la langue la plus parlée avec 460 millions de locuteurs – et le Marathi – parlée par 72 millions de personnes.

Ce livre, Le harpon du chasseur, écrit en 1969 par Markoosie, est en fait le premier roman inuit au Canada. En 2011, les Presses de l’Université du Québec ont fait traduire ce livre en français en y ajoutant une introduction de Daniel Chartier, professeur au Département d’études littéraires et directeur du Laboratoire international d’étude multidisciplinaire comparée des représentations du Nord. Vidya Vencatesan a pris connaissance de ce roman en 2013, lors d’une visite au Centre de recherche sur la littérature et la culture québécoises (CRILCQ) de l’UQAM, dirigé à l’époque par Daniel Chartier.

«Ce qui m’a frappé en lisant Le harpon du chasseur, c’est à quel point le sens de l’honneur, le sens du devoir familial et le rapport entre l’homme et l’animal dans le Grand Nord s’apparentent à la culture indienne, souligne Vidya Vencatesan. L’introduction de Daniel Chartier donne, quant à elle, une perspective globale de cette culture et nous permet d’entrer dans l’histoire avec quelques clés importantes en main.»

Récit tragique

Le roman de Markoosie est un récit complexe, noir et tragique, qui se termine par le suicide d’un adolescent. «La mort est omniprésente dans ce roman, parce qu’elle l’est aussi dans la réalité des Inuits, soutient Daniel Chartier. Confronté à la rareté des ressources pour survivre et à la froideur du climat, les Inuits forment un peuple qui vit dans les conditions les plus difficiles qui soient.»

Selon une étude publiée en 2013, le taux de suicide chez les Inuits du Nunavut est 13 fois plus élevé que dans le reste du Canada.

Collaboration croissante

Daniel Chartier. Photo: Nathalie St-Pierre

Financé par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie du Québec, ce projet de coopération entre l’Inde et le Québec s’accompagnera d’un lancement des deux versions du roman à Mumbai – possiblement en 2016 –, et d’une tournée de conférences au Maharashtra, un État de l’ouest de l’Inde, à laquelle participera Daniel Chartier. «Ces conférences présenteront l’œuvre et le contexte singulier de la culture inuite du Québec ainsi que la dimension nordique de la culture québecoise», observe le professeur.

C’est la première fois que l’Inde et le Québec collaborent dans le cadre d’un projet littéraire lié au Grand Nord québécois. «D’autres projets de collaboration ont déjà été menés, notamment des traductions en tamoul de nouvelles québécoises contemporaines, rappelle Vidya Vencatesan. Synergies-Inde, le journal international de recherches universitaires francophones que je dirige, a aussi consacré tout un numéro au Québec. Nos deux cultures ont beaucoup de choses en commun.»

«Les rapports entre le Québec et l’Inde deviennent de plus en plus importants, affirme Daniel Chartier. Chaque année, des colloques sont organisés en langue française en Inde et le nombre de locuteurs pouvant parler français ne cesse d’augmenter.»